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« Les Misérables », une histoire d’injustice et de brutalité qui ne se démode jamais.

« Les Misérables », une histoire d’injustice et de brutalité qui ne se démode jamais.
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Anne Hathaway dans
Anne Hathaway dans "Les Misérables" (2012). BDIM

Au XIXe siècle, le divertissement de masse était assuré par les grands feuilletons, ces romans fluviaux qui cherchaient à la fois à décrire le monde et à le transformer. Les nouvelles de Charles Dickens suscitaient une telle fascination que ses biographes racontent comment les lecteurs attendaient sur les quais des ports américains l'arrivée des navires chargés de magazines proposant les nouvelles parutions de ses livres. Mais aucun roman de l'âge d'or des feuilletons n'eut autant d'impact que Les Misérables de Victor Hugo (1802-1885).

Comme s'il s'agissait du lancement international d'une nouvelle aventure d'Harry Potter, le 3 avril 1862, le roman de Hugo, Rivière, commença à être distribué simultanément dans douze pays, du Brésil à la Russie (le français était alors la langue véhiculaire de la culture), rapportait Le Monde dans un article intitulé «  Les Misérables, un événement littéraire mondial ». Un mois après sa sortie, il citait la fille de l'écrivain : « Les Misérables provoquèrent un enthousiasme sans précédent dans toutes les classes sociales ; le livre était entre les mains de tous ; les personnages, devenus des archétypes, étaient cités en toutes occasions et dans tous les contextes. Des images de ces personnages ornent les vitrines de toutes les imprimeries ; des affiches monstrueuses pour Les Misérables sont placardées à chaque coin de rue. » La première édition, tirée à 100 000 exemplaires, un chiffre brutal pour l'époque, fut immédiatement épuisée. Le plus impressionnant est que l'impact de ce roman de deux mille pages perdure plus de 150 ans plus tard.

Melani García, gagnante de « Your Face Sounds Familiar 12 ».
Melani García, lauréate de « Your Face Sounds Familiar 12 ». Atresmedia

Français À l'occasion du bicentenaire de sa naissance en 2002, le maestro Rafael Conte écrivait dans EL PAÍS à propos du renouvellement constant de son succès : « Victor Hugo continue de vivre, comme le démontrent la fidélité de ses lecteurs et consommateurs, celle de l'industrie culturelle de notre époque, l'importance croissante de ses adaptations au cinéma, au théâtre et à la télévision, même dans les endroits les plus centraux : les États-Unis, d'où nous avons fréquemment vu des adaptations de Notre Dame de Paris et des Misérables au cinéma et au théâtre. » Curieusement, bien que la comédie musicale ait triomphé dans le monde entier — elle a été présentée dans 53 pays, a passé 40 ans sur la scène londonienne et a attiré 130 millions de spectateurs — elle n'est revenue à Paris qu'en 2024, bien qu'il s'agisse d'une œuvre écrite à l'origine en français et créée en 1980 dans la capitale française.

Et voilà : Melani García vient de remporter le concours télévisé « Tu cara me suena » avec une reprise de l'une des chansons les plus célèbres de la comédie musicale « I Dreamed a Dream », pour laquelle Anne Hathaway a remporté un Oscar en 2012 pour la version cinématographique de Tom Hooper, une chanson qui cumule 60 millions d'écoutes sur Spotify. En sortant chercher son prix, Hathaway a conclu son discours en déclarant : « J'espère que dans un avenir proche, les mésaventures de Fantine ne pourront être racontées que dans les romans et non dans la vie réelle. » Le succès sans fin des Misérables tient au fait que les injustices décrites par Hugo dans son livre, portrait du monde au début de la révolution industrielle, sont toujours d'actualité.

L'histoire, qui met en scène des dizaines de personnages et s'étend sur trente ans, décrit la société française du XIXe siècle, mais surtout celle de personnes dont la classe sociale et la naissance déterminent à jamais leur destin. Le protagoniste est Jean Valjean, un homme condamné à une terrible peine de bagne pour avoir volé un morceau de pain destiné à nourrir sa famille, et poursuivi sans relâche toute sa vie par un policier, Javert. Le symbolisme d'un personnage à jamais marqué par la pauvreté de son passé est d'une grande actualité. Hugo a également relaté des actes de grandeur – comme celui de l'évêque de Digne qui sauve Valjean – et d'extrême misère humaine.

Dans un monde où le racisme se généralise, où ceux qui fuient la pauvreté sont stigmatisés par l'extrême droite, comme si leurs origines les marquaient à jamais, où les migrants sont traqués à Torre Pacheco ou à Los Angeles, le message d'Hugo conserve toute sa force. La fuite interminable de Valjean, la malheureuse Fantine, sa fille Cosette, les méchants Thénardier et l'obsessionnel Javert incarnent un monde injuste et cruel qui non seulement refuse de disparaître, mais semble revenir en force.

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