Les talibans remportent leur premier succès diplomatique : les clés de la reconnaissance russe

La Russie est devenue le premier pays au monde à reconnaître officiellement les talibans comme le gouvernement légitime de l'Afghanistan, une décision qui rompt avec le consensus international maintenu depuis l'arrivée au pouvoir des fondamentalistes en 2021.

Talibans à Kaboul, capitale de l'Afghanistan. Photo : EFE
Le régime taliban a salué vendredi la décision de la Russie de les reconnaître comme le gouvernement légitime de l'Afghanistan comme étant « courageuse et historique », une décision qui, selon eux, crée un « précédent positif » pour les autres pays.
Le ministère afghan des Affaires étrangères a souligné que « l'Émirat islamique d'Afghanistan recherche des relations positives, constructives et respectueuses avec toutes les parties prenantes mondiales » et a estimé que « le moment est venu pour l'Afghanistan de remplir son rôle clé : servir de plaque tournante de connectivité (...) entre l'Asie centrale et l'Asie du Sud. »
Quel est l'impact mondial de cette reconnaissance ? Les talibans ont-ils accru leur activité diplomatique ?
Voici les détails de la première réussite diplomatique des talibans en Afghanistan.
La Russie de Vladimir Poutine reconnaît les talibans L'ambassadeur russe en Afghanistan, Dmitri Zhirnov, a reconnu hier soir à la télévision publique que Moscou procédait à la reconnaissance de l'Émirat islamique d'Afghanistan - le nom que les talibans utilisent pour leur pays - dans le but d'« établir une coopération totale » avec Kaboul.
La décision a été prise par le président russe Vladimir Poutine sur proposition de son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.

Le président russe Vladimir Poutine. Photo : AFP
Mardi dernier, le nouvel ambassadeur afghan nommé par les talibans, Mawlawi Gul Hassan, est arrivé à Moscou.
Suite à cette décision, le drapeau taliban – blanc avec le credo islamique inscrit au centre – a commencé à flotter à la mission diplomatique afghane à Moscou.
Normalisation des relations entre Moscou et Kaboul ces dernières années La Russie avait retiré les talibans de sa liste d'organisations terroristes en avril , où ils avaient été inclus en 2003 pour leurs liens présumés avec des groupes armés illégaux dans la région russe de Tchétchénie, où Poutine avait lancé la deuxième guerre de Tchétchénie en 1999.
Cependant, la Russie et les talibans ont commencé à normaliser leurs relations il y a des années.
De plus, cette décision intervient à un moment de revers internationaux pour la Russie , notamment après le renversement de son allié Bachar al-Assad en Syrie en décembre 2024.
Les relations entre Moscou et Kaboul sont entachées de conflits depuis des décennies. La guerre de 1989 entre l'ex-Union soviétique et l'Afghanistan, qui a vu le retrait des troupes soviétiques du pays après l'invasion de 1979, a été particulièrement marquante. Quinze mille soldats soviétiques ont péri lors de cette opération.

Des femmes manifestent à Kaboul contre les talibans. Photo : AFP
Pratiquement exclus de la scène politique internationale, les talibans ont tenté ces derniers mois de déployer un réseau diplomatique actif pour sortir de leur isolement.
Le 25 juin, ils ont nommé un ambassadeur en Turquie. Ils disposent actuellement d'environ 14 missions diplomatiques dans différents pays, dont la Turquie, la Chine et le Pakistan.
Cependant, jusqu'en Russie, ils n'avaient la reconnaissance d'aucun pays.
L'ONU, d'autres organisations internationales et diverses ONG ont dénoncé les politiques répressives des talibans ces dernières années, notamment contre les femmes, fondées sur une interprétation stricte de la loi islamique, ou charia.
L'arrivée au pouvoir en 2021 et le gouvernement destitué Le retour au pouvoir des talibans en août 2021 – leur premier régime a duré de 1996 à 2001, jusqu’à l’invasion américaine et l’établissement d’un gouvernement intérimaire à Kaboul – a été une « offensive éclair » dans le cadre de la fin d’un conflit qui a duré près de deux décennies.
Avec le retrait des troupes américaines et alliées du pays – convenu par les talibans et l’administration Trump en 2020 à Doha et ratifié plus tard par l’administration Biden – les fondamentalistes ont réussi à prendre Kaboul avec peu de résistance le 15 août et à renverser le gouvernement républicain dirigé par Ashraf Ghani, qui a fui l’Afghanistan.
Bien que renversé, le gouvernement précédent maintient une présence symbolique et institutionnelle en exil, principalement par l’intermédiaire de diplomates en poste dans des organisations internationales.

Membres des talibans en Russie, le 20 octobre 2021. Photo : EFE / EPA / MINISTÈRE RUSSE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
La décision de la Russie de reconnaître la légitimité du gouvernement taliban a suscité l’indignation et le choc au sein de la société civile afghane.
Les militantes des droits des femmes et les étudiantes ont fait valoir que cette reconnaissance légitime le système de réglementation répressif des talibans , qui affecte particulièrement les femmes afghanes, qui sont soumises à un système de réglementation draconien qui restreint pratiquement toutes leurs libertés.
eltiempo