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Singularités avec conséquences

Singularités avec conséquences

La question du financement régional demeure l'un des principaux défis auxquels est confronté l'État des Communautés autonomes. Dans la Communauté valencienne, la nécessité de réformer un système manifestement injuste et dysfonctionnel est perçue non pas comme une simple exigence, mais comme un problème structurel qui affecte l'exercice même de l'autonomie constitutionnelle. Cependant, ce qui était autrefois un front uni ressemble désormais davantage à une déroute.

Il est important de rappeler et de souligner que la Constitution de 1978 ne prédétermine pas un modèle unique de financement régional. Si elle établit des principes tels que la solidarité, l'autosuffisance financière et l'équité, elle laisse au législateur une large marge de manœuvre pour façonner le système par le biais de lois telles que la LOFCA. Ce caractère ouvert permet de réformer le système sans avoir à modifier ou réviser le texte constitutionnel, ce qui renforce la viabilité d'une réforme concertée, ambitieuse et approfondie.

Historiquement, les réformes majeures du modèle de financement ne sont pas nées d'une réflexion structurelle consensuelle, mais plutôt de circonstances politiques particulières, lorsque la gouvernabilité était en question. À cette époque, certaines régions disposant d'un plus grand pouvoir d'influence, notamment la Catalogne, ont fait adopter des réformes bénéfiques qui se sont ensuite généralisées ; cependant, elles peuvent aujourd'hui avoir des effets déséquilibrants pour l'ensemble de la région.

En fait, la singularité financière qui se pose à nouveau pour la Catalogne avait déjà été tentée de la protéger par voie législative en 2007, mais la décision « interprétative » du Tribunal constitutionnel l'a empêchée.

La proposition actuelle, manifestement incompatible avec le principe d'égalité des droits entre les Espagnols, a été largement critiquée au sein de la Commission des communautés autonomes du Sénat, dans un rapport remettant en cause ses aspects les plus significatifs, reprenant des arguments du passé sans tenir compte de la menace qu'ils représentent pour la cohésion interne du système et sa viabilité même. Où en est le refus de l'Espagne de tolérer de nouveaux accords fiscaux ?

Parallèlement à ce débat, la Communauté valencienne a avancé des propositions beaucoup plus raisonnables, fondées sur le principe d'équité et la nécessité de garantir un financement équitable, notamment pour un territoire en proie aux effets pervers du système actuel. Le Consell a même approuvé un document contenant des éléments pour une éventuelle réforme constitutionnelle fédéraliste, sans toutefois formuler de proposition définitive. Ce document se caractérisait toutefois par la solution de mutualisation de tout ou partie de la dette, notamment celle qui était une conséquence directe de son sous-financement historique.

Il est significatif que nombre de ces propositions aient été reportées ou aient cédé à la demande actuelle de singularité financière de la Catalogne, sous le faux prétexte qu'elles ne sont pas incompatibles.

Les données les plus récentes corroborent les affirmations de Valence : les dépenses publiques par habitant dans la Communauté valencienne sont parmi les plus faibles du pays. En 2024, elles n'étaient que de 3 020,08 € par habitant, bien en deçà de la moyenne du système commun (3 399,78 €) et encore plus loin derrière la Catalogne (3 822,42 €) ou le Pays basque (6 614,40 €). Cet écart est intenable à moyen et long terme.

Contrairement à la situation en Catalogne, où le problème ne réside pas dans les recettes mais dans les dépenses, la Communauté valencienne souffre d'un sous-financement structurel évident. Il ne s'agit donc pas d'un traitement privilégié, comme dans le cas catalan, mais du droit d'accéder aux ressources nécessaires pour fournir les services publics de base dans des conditions d'égalité. Aujourd'hui, la Communauté valencienne est soumise à de fortes pressions : pour la première fois en douze ans, le gouvernement valencien n'a pas reçu le Fonds de liquidités régional extraordinaire (FLA) du gouvernement espagnol.

Le faible investissement de l'État dans certains territoires est également délibérément confondu avec un problème de financement régional. Il est nécessaire de distinguer les deux débats : le financement affecte les ressources dont dispose la Generalitat (gouvernement catalan) pour exercer ses compétences ; l'investissement de l'État affecte les décisions du gouvernement espagnol en matière d'infrastructures et de développement territorial, qui ne peuvent même pas être conditionnées par des clauses statutaires – comme celle de Valence de 2019 – intégrées dans différents territoires. Une comparaison avec la dernière décennie révèle également un affront aux Valenciens, même si sa solution doit être envisagée par d'autres moyens que le système de financement. Pour vous donner une idée, 2019 a été l'année où nous avons été les plus proches de concrétiser l'investissement auquel nous avions droit sur le plan territorial, après des décennies de report et de report.

La réforme du système de financement doit être abordée par consensus, mais aussi avec fermeté. Le Parlement valencien a écouté de nombreux experts qui s'accordent à dire que la situation est intenable et nécessite des solutions structurelles. Celles-ci pourraient inclure une réforme en profondeur de la Loi organique de protection des droits des personnes (LOFCA), voire l'exploitation des pouvoirs extra-légaux élargis permis par le cadre constitutionnel. L'essentiel est que le nouveau financement garantisse la suffisance, l'équité et la coresponsabilité fiscale. Il doit également mettre fin aux asymétries actuelles qui pénalisent systématiquement des territoires comme Valence. La Communauté valencienne ne réclame ni privilèges ni traitement de faveur. Elle exige ce que tout observateur neutre considérerait comme raisonnable : un financement équitable. L'absence de budget général de l'État et le refus de convenir d'un fonds de compensation pour les territoires sous-financés jusqu'à la réforme du système réduisent la possibilité d'améliorer la situation difficile des comptes publics de Valence. Il convient de rappeler que l'investiture de l'État était liée aux progrès du financement régional, non pas tant dans une perspective unilatérale mais dans une perspective communautaire, où toutes les demandes étaient satisfaites.

Il est donc clair que la réforme du financement régional n'est ni un souhait ni une aspiration politique : c'est une nécessité urgente et pressante. Car sans ressources suffisantes, l'autonomie locale cesse d'être une réalité et devient une chimère. Ceci est incompatible avec le modèle décentralisé inscrit dans la Constitution.

Mariano Vivancos est professeur de droit constitutionnel à l'Université de Valence.

EL PAÍS

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