Du street art à la chapelle de l’Observance à Draguignan avec JonOne

Il a fallu l’attendre une bonne demi-heure: "C’est l’artiste, ça", lançait JonOne en débarquant avec sa suite à la chapelle de l’Observance à Draguignan. Le regard pétillant, le verbe facile – avec une pointe d’accent américain –, le New-Yorkais présente l’exposition Panorama.
Des œuvres conçues spécialement pour cette installation dans la chapelle. "C’est impressionnant ici. Tu es un peu perdu avec le volume de l’espace, mais ça, ça fait revivre un lieu comme cette chapelle."
Graffeur dans ses débutsInstallé en France depuis 1987, il rend hommage à son pays d’adoption pour la liberté qu’il lui offre. "Quand je suis arrivé ici, j’ai vu ça: liberté, égalité, fraternité. Et ça, tu ne le vois pas ailleurs. Les Français m’ont accueilli à bras ouverts. Il y a un art de vivre ici comme nulle part ailleurs. C’est un pays d’avant-gardistes. Même à Draguignan, regarde où je suis: dans une église! C’est dingue", s’amuse-t-il. Lui qui a débuté comme graffeur s’exprime ici sur des toiles plus classiques.
Connu pour ses peintures éclatantes, JonOne ne se contente pas d’accrocher des toiles aux murs. Il habite l’espace, joue avec les volumes et transforme la chapelle en un sanctuaire contemporain.
"Pour moi, avoir mes œuvres ici, c’est un travail sacré. Dans le sens que ça va dans le ciel", souffle-t-il. Il expose pour la deuxième fois dans une chapelle, après un accrochage à Montpellier. Cela constitue un lien avec son passé. Petit, il suivait sa mère dans les églises. Issu d’un quartier défavorisé, sa vie était teintée de grisaille, et son avenir paraissait, de son propre aveu, obscur.
Alors quand il se rendait dans les lieux de culte, les vitraux et peintures qu’il croisait le laissaient de marbre. "Ça ne me correspondait pas. C’étaient deux vies contraires. Moi, je viens d’un endroit où il n’y avait pas d’espoir, rien. Alors je me suis dit: je vais créer mes propres images."
Douze toiles monumentalesCette exposition à Draguignan reflète son parcours de résilience, une ascension du sombre vers la lumière. À l’instar des trois toiles installées dans l’ancien chœur. Certainement un clin d’œil à la Trinité, mais dans leurs compositions, ces toiles reflètent surtout le parcours de leur auteur. "Les couleurs sombres en bas, et les couleurs vives en haut, ça donne de l’espoir. Même si j’ai grandi sans rien, j’ai décidé que ma vie serait un arc-en-ciel."
Dans la pièce principale, l’installation se compose de douze toiles monumentales. Un chiffre qui ne doit rien au hasard. Avec humour, JonOne traduit: "Chaque toile représente un apôtre. Et moi, je suis au centre, comme le prêtre ou le dieu vivant qui rayonne."
La peinture comme style de vieC’est dans les années 1980 que JonOne a commencé dans cet art. Aujourd’hui, il a troqué les bombes de peinture pour de l’acrylique ou de la peinture à l’huile, afin de pouvoir apporter de la matière à ses toiles, toujours dans un style abstrait. Il passe des nuits à travailler ses œuvres, parfois pendant plusieurs mois. "La peinture, c’est un style de vie. C’est ma façon de garder la flamme allumée." Alors, quand il se présente face à une toile blanche, il s’isole.
"J’écoute de la musique, je coupe le monde extérieur. Je n’ai pas besoin de beaucoup de choses, tout est dans ma tête."
De ses méninges au pinceau, il tisse ses toiles et engage le public à le suivre. "J’espère que ça va inspirer les gens ici, leur donner envie de sortir, de créer, d’avoir de la curiosité. Parce que moi, l’art a changé ma vie."
Et pour guider un peu plus ses spectateurs, il a réalisé une fresque au sol dans des formes rappelant les graffs de ses débuts. Une flèche qui conduit les visiteurs vers le chœur.
Demi-dieu, guide suprême, l’artiste cultive l’ego-trip pour en mettre plein les yeux.
Savoir+
Jusqu’au 27 septembre à la chapelle de l’Observance à Draguignan. Ouvert du mardi au samedi de 10h à 17h. Gratuit.
Var-Matin