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Et si les séries sur les ultrariches nous rendaient égoïstes et insensibles ?

Et si les séries sur les ultrariches nous rendaient égoïstes et insensibles ?

“Sirens”, “Mountainhead”, “Complicités” : de plus en plus de séries et de films américains mettent en scène des personnages très aisés. Ces fictions entament notre sens de la solidarité et dégradent le tissu social, estime le magazine “The Atlantic”.

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Lecture 2 min. Publié le 11 juin 2025 à 05h00
Vingt-sept ans après sa première apparition à l’écran, Carrie Bradshaw (Sarah Jessica Parker) mène une vie de princesse dans “And Just Like That…”. Craig Blankenhorn

“L’action n’a plus aucun intérêt, car il n’y a plus d’action. La raison d’être de la série est désormais d’enchaîner les exposés visuels sur tout ce que l’argent permet de s’offrir, comme si nous étions devant la déclinaison animée d’une édition spéciale de Vogue ou d’Architectural Digest.

À la fin de mai, And Just Like That…, le sequel de la série culte Sex and the City, est repartie pour une troisième saison (à voir en France sur Max). Un quart de siècle après leur création, ses héroïnes new-yorkaises n’ont plus aucun souci d’argent. Qu’elles aient fait fortune ou conclu un bon mariage, elles mènent une existence dorée, et Sophie Gilbert, la critique télé de The Atlantic, ne cache pas l’ennui qu’elle éprouve devant leurs aventures.

La journaliste américaine dénonce une tendance de fond apparue au milieu des années 2000, avec des séries comme Desperate Housewives, Entourage ou Newport Beach. Aujourd’hui, trop de fictions mettent en scène le quotidien des ultrariches, de Sirens (Netflix) à Complicités (Prime Vidéo), en passant par Mountainhead (Max), écrit-elle. Et d’autres, tout aussi nombreuses, mettent en scène des personnages qui semblent ne jamais frémir quand approche la fin du mois.

Pour Sophie Gilbert, l’heure est grave. “La vie de 99 % des Américains n’est plus représentée sur le petit écran, et c’est quelque chose de vital qui a disparu”, argumente-t-elle.

“L’argent ne fait pas que rendre la télévision ennuyeuse. Il transforme aussi notre psyché collective – comme s’il devenait acquis que la richesse était le seul marqueur d’une existence digne d’intérêt et que les gens aisés étaient les seules personnes dignes d’attention.”

Ces séries voudraient nous faire croire, non sans cynisme, que l’argent ne fait pas le bonheur et que les gens très riches sont aussi très malheureux ou très mesquins. Mais avec quel effet ? La journaliste américaine cite à titre d’exemple une étude de la London School of Economics, publiée en 2018, qui montrait que plus une personne était exposée à des programmes mettant en valeur le luxe et la richesse, plus elle était encline à accepter une réduction des prestations sociales.

Pire : l’omniprésence de happy few sur nos écrans nous prive d’autant d’occasions de ressentir de l’empathie pour des personnages d’autres couches sociales, d’explorer “toute l’humanité et toute la complexité de tant de gens ordinaires qui vivent de plus en plus sur le fil, et qui ont plus que jamais besoin que nous les prenions en considération”, poursuit la journaliste de The Atlantic.

Sophie Gilbert conclut son article en réclamant davantage de séries comme la fiction hospitalière The Pitt (sur Max), habile à montrer “des salariés qui luttent pour colmater les brèches d’une société américaine de plus en plus inégalitaire”. Ou The Bear (de retour le 25 juin pour une quatrième saison, sur Disney+), qui retrace le combat des employés d’un fast-food pour garder la tête hors de l’eau, sur le plan tant professionnel que personnel. Ces séries sont plus que jamais “nécessaires à regarder, alors que ce à quoi nous prêtons attention aujourd’hui va déterminer de quoi notre avenir sera fait”, insiste-t-elle.

Courrier International

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