Bouteilles consignées : succès et limites d’un système généralisé en Allemagne et au Danemark

La consigne pour les contenants en verre sera expérimentée à partir du 12 juin dans quatre régions françaises : les Pays de la Loire, la Bretagne, la Normandie et les Hauts-de-France. Les consommateurs pourront donc ramener leurs emballages dans les magasins partenaires de l’opération (Monoprix, Carrefour, Intermarché, Biocoop, Système U, Leclerc, Auchan…) Ils récupéreront entre 20 et 30 centimes par bouteille.
L’objectif est de récupérer et laver 30 millions d’emballages en verre, qui pourront ensuite être réutilisés entre 20 et 50 fois. Selon Citeo, l’entreprise chargée de mettre en place ce système de consigne, cela permettra d’économiser 75 % d’énergie, 50 % d’eau et de réduire de 80 % les émissions de CO2.
Si les initiatives en France se concentrent actuellement sur le verre, certains pays européens, plus en avance, ont également étendu ce système de consigne aux emballages jetables, comme les canettes et les bouteilles en plastique. C’est le cas depuis plus de vingt ans en Allemagne et au Danemark. Or ce système est aujourd’hui critiqué.
Outre-Rhin, la consigne pour les bouteilles en verre a été réintroduite dès les années 1990 et a été étendue aux autres types d’emballages recyclables dès 2003. Une habitude véritablement inscrite dans les mœurs. Les Allemands ont pris l’habitude de rapporter leurs bouteilles, canettes et pots de yaourt dans les « Pfandautomat », ces appareils obligatoirement installés à l’entrée de chaque supermarché. Il n’est pas rare de voir des étudiants ou des personnes précaires, souhaitant arrondir leur fin de mois, vider dans ces appareils des chariots entiers de ces déchets consignés, après les avoir ramassés dans les parcs.
Le montant récupéré pour chaque emballage varie entre 8 et 15 centimes pour les contenants réutilisables et peut atteindre 25 centimes pour les contenants à usage unique (canettes, bouteilles en plastique et en verre non réutilisables, pots de yaourt…). Le taux de collecte général avoisine les 98,5 %, selon le Centre européen de la consommation. Il s’agit de l’un des meilleurs d’Europe.
En étendant les consignes aux emballages à usage unique, l’Allemagne espérait favoriser leur recyclage, mais la mesure a toutefois eu un effet pervers. Elle a encouragé le recours à ce type de produit. La part de bouteilles réutilisables mises sur le marché en Allemagne a drastiquement diminué ces vingt dernières années, passant de 58 % en 2003 à seulement 24 % aujourd’hui, au profit des contenants consignés mais jetables. Or si ces derniers sont certes mieux collectés et mieux recyclés qu’auparavant, ils restent plus polluants.
Au Danemark, le système de consigne est une plus vieille tradition encore. Pour les bouteilles en verre, il remonte aux années 1970. Le pays avait même doublé cette mesure en 1982 par une interdiction de contenants à usage unique pour les boissons, tels que les canettes en métal et les bouteilles en plastique. Mais cette interdiction fut retoquée par l’Union européenne en 1999, au nom des règles du marché unique qui autorisait ces types d’emballages.
Pour pallier les effets négatifs de la réintroduction des canettes et bouteilles en plastique, le Danemark a donc étendu son système de consigne à tous les contenants de boisson dès 2002. Au centre de ce système figure le Dansk ReturSystem, un organisme à but non lucratif, chargé de récupérer les canettes et bouteilles consignées (avec le logo PANTS) dans les points de collecte puis de les revendre à des sociétés spécialisées dans leur recyclage pour produire de nouveaux emballages.
Comme en Allemagne, le taux de retour des objets consignés est très important, de l’ordre de 98 %. Mais comme son voisin, le pays a également connu une explosion des emballages jetables et recyclables, qui représentent aujourd’hui 86 % du marché des boissons consignés. Les producteurs de boissons, dont les nombreux brasseurs danois, qui avaient poussé dans les années 1970 à la mise en place de la consigne pour le verre réutilisable, préfèrent aujourd’hui les emballages jetables, plus faciles à utiliser (moins de procédés complexes à mettre en place, moins d’équipements associés, moins de gestion de stocks).
La Croıx