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« Je veux rester ici, c’est ma façon de rendre ce que j’ai reçu » : Rayen, étudiant en médecine sous OQTF victime de la circulaire Retailleau

« Je veux rester ici, c’est ma façon de rendre ce que j’ai reçu » : Rayen, étudiant en médecine sous OQTF victime de la circulaire Retailleau

L’apprenti en blouse blanche peut enfin relâcher la pression. Rayen Fakhfakh, Tunisien de 21 ans, sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), s’est vu promettre, début juin, un titre de séjour provisoire d’un an. La mobilisation médiatique, à base d’articles de presse et de déclarations publiques de confrères, a permis d’inverser la vapeur.

Mais cet étudiant en cinquième année de médecine n’a pas oublié le « choc total » ressenti au moment de la réception de son avis d’expulsion fin février. « En allant chercher le recommandé à la Poste, je m’attendais à tout sauf ça », déplore celui qui a également reçu le soutien de son université Paris-Saclay.

Porté par cette vague d’indignation, le jeune homme studieux obtient dans un premier temps, via un référé suspension, l’annulation de cette OQTF et une autorisation provisoire de séjour jusqu’en novembre. « Quand je suis allée la récupérer, j’en ai profité pour redonner mon dossier à la préfecture de Seine-Saint-Denis. J’avais l’impression qu’il n’avait pas été lu, explique-t-il. Ensuite, grâce à un journaliste qui a suivi mon affaire, j’ai su que j’avais finalement obtenu un titre jusqu’en mai 2026. Ça va beaucoup mieux depuis ! » se réjouit-il.

Ce bachelier à 16 ans, originaire de Sfax, qui pensait cocher toutes les cases d’une intégration « modèle », était déjà coutumier de la galère administrative. Tous les trois mois, il devait aller chercher un récépissé en préfecture. « Pour mon dossier de régularisation, je garde tout depuis des années : la moindre ordonnance, mes factures, des mots de mes professeurs…, énumère-t-il d’une voix posée. Quand j’ai voulu le déposer à ma majorité, j’ai mis plus d’un an et demi rien que pour avoir un rendez-vous. »

Engagé dans diverses associations, établi en Seine-Saint-Denis depuis son arrivée à 12 ans en 2016, Rayen se voyait souvent rappeler son statut particulier : « J’avais participé à l’organisation d’un voyage humanitaire au Togo mais je n’ai pas pu y aller car je ne peux pas quitter le pays. »

Dans un contexte de pénurie de médecins, avec 212 000 docteurs en activité en 2024 (en baisse par rapport à 2023) et un recours vital aux praticiens à diplômes hors Union européenne (Padhue) pour empêcher l’effondrement des hôpitaux publics, la décision visant Rayen est d’autant plus incompréhensible : « À l’hôpital Paul-Brousse (à Villejuif, dans le Val-de-Marne – NDLR) où je suis en stage de réanimation, la moitié des praticiens sont étrangers. On sait que le nombre de personnes formées est insuffisant. Une fois mes études finies, je veux rester ici. C’est ma façon de rendre ce que j’ai reçu. » Comme lui, 1 500 à 2 000 étudiants étrangers en médecine, soit 6 % des effectifs, font face à des difficultés administratives, souligne le site d’information Caducée.net, reprenant un rapport de l’Ordre des médecins.

En examinant le document reçu par Rayen, Clotilde Maillard, militante à Réseau éducation sans frontières (RESF) en Seine-Saint-Denis, a, elle aussi, halluciné : « C’est un copier-coller type ! Dans son OQTF, on dit qu’il a un frère ici alors qu’il en a deux. On lui reproche d’être resté en France avec un visa expiré. Or, il était mineur à l’époque et il n’y a pas besoin de titre de séjour avant 18 ans ! On lui reproche également de ne pas justifier d’une insertion, ni d’une perspective professionnelle, un comble. »

Depuis la circulaire Retailleau de janvier 2025, qui a resserré les critères de régularisation et a remplacé la circulaire dite Valls qui permettait notamment à certains jeunes de 18 ans justifiant d’une assiduité scolaire de demander un titre de séjour au bout d’un certain temps, les membres de RESF constatent une pluie d’OQTF par endroits : « À Montpellier ou encore Lyon, leur nombre flambe, relate Clotilde Maillard. Partout, les critères restent complètement fumeux. On voit que, pour des couples arrivés le même jour, l’un est régularisé et l’autre doit quitter le territoire. Rayen est aussi victime du climat politique nauséabond. »

Alors que les règles instituées par Bruno Retailleau rendent également plus compliquée la régularisation des personnes ayant déjà été frappées d’une OQTF, celui qui souhaite devenir chirurgien orthopédiste dénonce « une suspicion généralisée. Je lisais des réactions aux différents articles me concernant sur les réseaux sociaux disant « il a dû faire quelque chose de mal » pour être menacé d’expulsion ! On a l’impression que la France veut se débarrasser de tous les étrangers ». Dans les starting-blocks pour les examens d’internat à l’automne, Rayen ne demande qu’une seule chose : poursuivre ses études avec un minimum de sérénité.

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