Un gigantesque pont revient sur le devant de la scène


La zone entre la Calabre (au premier plan) et la Sicile (au fond) a déjà connu des séismes dévastateurs, ce qui représente un risque en cas de construction du pont, pour certains.
Jeter le plus long pont suspendu au monde entre la Sicile et la pointe de la Botte italienne? Le gouvernement de Giorgia Meloni a relancé ce projet coûteux, dont l’idée était évoquée dès l’unification de l’Italie, à la fin du XIXe siècle, et dont nombre d’observateurs estiment qu’il ne verra jamais le jour. L’objectif de cette œuvre titanesque, pour laquelle Rome veut engager 12,7 milliards de francs: franchir le détroit de Messine en 15 minutes de voiture grâce à ses six voies d’autoroute et y installer une voie ferroviaire.
Mais ce même détroit est réputé pour ses vents violents, proches des 100 km/h, un risque pour la stabilité du pont. Et cette portion du sud de l’Italie se trouve à la limite entre deux plaques tectoniques et mettrait en péril des réserves naturelles protégées. Rome se veut rassurant: le pont sera à la pointe de l’ingénierie et la partie suspendue entre ses deux piliers atteindrait 3,3 km. Mais les inquiétudes principales relèvent de la longue histoire italienne de travaux publics annoncés, financés et qui ne se concluent jamais.
Le gouvernement devrait définitivement approuver le projet en juin, avant l’ouverture des chantiers «dès cet été», a promis le ministre des Infrastructures et des Transports, Matteo Salvini. Le début des travaux avait déjà été annoncé pour l’été 2024, mais les reports sont monnaie courante dans l’histoire de ce pont.
En outre, le ministre a affirmé que le pont créerait 120’000 emplois en Calabre et en Sicile. Mais pour Domenico Marino, économiste à l’Université de Reggio de Calabre, il est peu probable que les créations d’emplois à long terme compensent les suppressions de postes liées aux réductions de liaisons en ferry. (afp/ftr)
Le pont de Messine représente «un espoir pour les jeunes», souligne Matteo Salvini. Mais nombre d’élus locaux et d’experts redoutent que la ’Ndrangheta et Cosa Nostra, les mafias de Calabre et de Sicile, ne profitent largement de cette manne. En plus, ces régions sont dépourvues de trains à haute vitesse et l’eau y est souvent rationnée à cause de la vétusté du réseau. «On veut faire croire à tout un territoire que son seul espoir repose sur ce pont qui n’arrive jamais», déplore Luigi Storniolo, un opposant.
20 Minutes