Alisha Lehmann, plus qu’un atout médiatique pour la Suisse, avant son quart de finale de l’Euro 2025

Que ce soit dans son club, la Juventus Turin, ou au sein de sa sélection nationale, la footballeuse suisse Alisha Lehmann est plus souvent sur le banc des remplaçantes que parmi le onze titulaire. Cette situation devrait se répéter, vendredi 18 juillet à 21 heures, à Berne (Suisse), alors que la Nati affronte l’Espagne, championne du monde en titre, en quarts de finale de l’Euro de football.
L’attaquante est pourtant l’une des figures de proue du ballon rond dans son pays, et au-delà. Ses 17 millions d’abonnés sur la plateforme Instagram en attestent. Aucune de ses homologues, même internationales, ne fait mieux. A titre d’exemple, l’icône américaine Alex Morgan n’en a « que » 9,6 millions ; les Espagnoles Alexia Putellas et Aitana Bonmati, toutes deux lauréates à deux reprises du Ballon d’or, sont loin derrière la Suissesse avec respectivement 3,2 millions et 1,9 million d’abonnés.
Si le rôle de « joker » d’Alisha Lehmann sur le terrain semble peu en adéquation avec sa popularité, il répond toutefois à une logique sportive. La sélection suisse, qualifiée pour la première fois pour la phase à élimination directe du tournoi continental, bénéficie de cadres solides – notamment la capitaine Lia Wälti (32 ans) et la défenseuse Noëlle Maritz (29 ans) – autant que de l’émergence d’une jeune génération talentueuse – notamment la défenseuse Iman Beney (18 ans), la milieu Sydney Schertenleib (18 ans) et l’attaquante Leila Wandeler (19 ans). Avec huit buts en 60 capes, Alisha Lehmann, 26 ans, qui a fait ses débuts sous le maillot de la Nati en 2017, ne rentre dans aucune de ces catégories.
Neuf minutes de jeu dans le tournoiDepuis le début de cet Euro 2025 à domicile, elle n’a disputé… que neuf minutes de jeu, avec, en outre, un replacement inattendu au poste de latéral droit. De quoi faire de l’ancienne pensionnaire du championnat anglais, passée par West Ham, Everton et Aston Villa, la cible de critiques, estimant qu’elle ne doit sa sélection qu’à son statut d’athlète-influençeuse.
Partenaire privilégiée d’une marque de paris sportifs, d’une boisson énergisante ou encore égérie d’une marque de lingerie, Alisha Lehmann ne cantonne pas sa carrière professionnelle aux pelouses de football et sait jouer de son image avec agilité. Ce qui lui vaut foule de reproches – contrairement à ses homologues masculins qui opèrent pourtant d’une manière similaire. Mais l’intéressée assume sa ligne : « Nous avons besoin de ça, expliquait-elle avant l’Euro. Nous ne pouvons pas faire grandir le foot féminin sans les réseaux sociaux, la télé et les médias. Nous devons juste trouver le meilleur moyen de nous en servir. »
L’engouement du public autour de l’équipe suisse est palpable depuis le début du tournoi et Alisha Lehmann n’y est pas complètement étrangère. Le 10 juillet, près de 4 000 personnes avaient fait le déplacement à Berne pour assister à un entraînement de la Nati, acclamant l’enfant du pays – elle est née à une quinzaine de kilomètres de là – et la sollicitant pour des selfies.
« La motivatrice en chef »La sélectionneuse Pia Sundhage et ses coéquipières n’hésitent d’ailleurs pas à monter au créneau pour défendre l’attaquante face à ses contempteurs, insistant sur son apport indéniable à la cohésion du groupe. Car Alisha Lehmann est, selon le quotidien suisse Blick, la « motivatrice en chef » de l’équipe, chargée des discours d’avant-match depuis celui qui a précédé la victoire face à l’Islande, le 6 juillet, en phase de groupes.
Lors de la précédente édition du tournoi continental, en 2022, Alisha Lehmann avait préféré se mettre en retrait de la sélection, pour « raisons psychologiques ». Trois ans plus tard, elle s’épanouit dans le système collectif prôné par Pia Sundhage, qui rappelait d’ailleurs en avril : « Les 23 joueuses qui iront à l’Euro ne seront pas forcément les 23 meilleures du pays, mais celles qui formeront la meilleure équipe. »
La Nati aura fort à faire, vendredi, face aux Espagnoles, favorites pour la victoire finale et symbole d’unité depuis leur bras de fer avec leur fédération nationale, marqué notamment par l’affaire du baiser forcé imposé par son président déchu, Luis Rubiales, à l’attaquante Jenni Hermoso après la finale du Mondial 2023. Au moment de motiver ses coéquipières, Alisha Lehmann pourra s’inspirer de l’exemple de leurs homologues italiennes, qui ont su renverser la Norvège en quarts pour s’offrir leur première demi-finale européenne depuis 1997.
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