Ligue des champions : le PSG met l’Inter à terre et s’envole vers son étoile
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Parmi les maximes les plus absurdes qui pullulent dans le foot («revenir des vestiaires avec de meilleures intentions», «prendre les matchs les uns après les autres»…), on a toujours eu un faible pour celle-là : «Une finale ne se joue pas, elle se gagne.» Pour la gagner, il faut d’abord la jouer. Et si les Parisiens ont joué celle qui les opposait à l’Inter Milan, ce samedi 31 mai à Munich, leurs adversaires sont passés sans transition de la rituelle période d’observation à la déprime, déroulant le tapis rouge à un club qui sera allé chercher sans coup férir (5-0) sa première consécration européenne au bout de la finale la plus déséquilibrée, la plus nette de ces quinze dernières années.
L’équipe parisienne a déroulé un match merveilleux, encore plus suave et brillant que tout ce qui avait précédé sur le front européen jusqu’ici. Elle y a mis de l’élégance, du brio, une vitesse incomparable et un certain acharnement aussi, disant le plaisir que ceux-là ont de jouer au foot et de s’échanger le ballon.
João Neves et consorts étaient pour la première fois confrontés à une drôle d’équation, inédite cette saison de leur point de vue : une défense centrale adverse à trois éléments (au lieu de deux), et une manière de respirer le match à l’italienne, c’est-à-dire très différente de la franche rudesse des quatre équipes anglaises croisées depuis janvier dans la compétition. Les champions de France ont ainsi attaqué la partie piano. Quand une erreur monumentale du défenseur italien Federico Dimarco a fléché le match vers le camp parisien : l’Intériste a traîné derrière ses coéquipiers pour remettre trois adversaires en jeu seuls face au but défendu par Yann Sommer, Désiré Doué (19 ans) bénéficiant d’un temps infini avant de lâcher le ballon pour Achraf Hakimi. A charge pour le Marocain de pousser le ballon dans le but vide (1-0, 12e), contenant sa joie en souvenir de son passage dans le club lombard.
L’Inter s’est alors légèrement découvert. Quelques miettes, pas beaucoup plus. Dont les Parisiens, tout en vitesse et en précision technique, ont fait un festin, transperçant la défense adverse sur un contre impliquant les trois attaquants parisiens : Khvicha Kvaratskhelia pour Ousmane Dembélé dans la profondeur, celui-ci renverse le jeu côté droit pour Doué qui voit Dimarco, encore lui, dévier sa frappe alors qu’il s’est honteusement tourné au lieu de faire face à son adversaire : 2-0 à la 20e minute, un avantage que l’on sait déjà définitif. En effet, pas une équipe ne s’est imposée en finale de Ligue des champions depuis dix ans alors qu’elle avait un but de retard. Alors deux… Et la supériorité parisienne dépasse alors de beaucoup les limites étroites du tableau et des mathématiques. Parce que les Milanais sont dévorés de partout.
Et évitent de regarder vers leur banc de touche où leur entraîneur, Simone Inzaghi, les exhorte à rentrer dans un combat que personne ne se sent de livrer. La fin de la première période fut de nature à donner des regrets aux Parisiens. Oublié à répétition (43e, 46e + 1) par les défenseurs adverses, Kvaratskhelia aurait pu donner au score des proportions plus larges mais voilà, 2-0 aux citrons avec une équipe parisienne rutilante sur chaque ballon de récupération, c’est le petit Jésus en culotte de velours. Au retour des vestiaires, les Italiens vont enfin baisser la tête.
Avec les qualités et les défauts d’une équipe qui met le front dans le guidon : une ardeur un peu supérieure dans les contacts, mais une lucidité incertaine, les attaquants parisiens s’ouvrant le chemin de la surface adverse avec une facilité accrue. La grande parade fut déclenchée à la 63e minute, un rêve de contre-attaque et d’insolence : une passe de la semelle dans son dos de Dembélé pour Vitinha, le Portugais qui fixe merveilleusement le dernier défenseur pour envoyer Doué sur orbite et le jeune (19 ans) attaquant qui bat Sommer côté fermé (3-0), laissant une impression irréelle, entre le conte de fées et une facilité confinant à l’abstrait. Kvaratskhelia a ainsi mis le quatrième (4-0, 73e) dans une atmosphère de carnaval, c’est-à-dire de joie et de concorde, et on s’est même mis à envisager un saut de l’inconnu : une finale de Ligue des champions, un océan qui s’ouvre sous les pieds des hommes de Luis Enrique.
Sur le fond, ça ne change rien : on ne se souvient pas d’un adversaire à ce point accessoirisé, le but d’un Senny Mayulu (19 ans) tout jute sorti du centre de formation du club (5-0, 86e) donnant une patine «locale» enrichissant encore, si besoin était, le récit de la saison parisienne. Les Milanais en ont fini ridiculisés, en larmes. Le Paris-SG a beaucoup souffert en Ligue des champions depuis dix ans, essuyant des revers cruels, parfois construits sur des approximations arbitrales. Ce samedi, ils ont laissé tout ça derrière eux. Une bonne fois pour toutes.
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