Sélectionner la langue

French

Down Icon

Sélectionnez un pays

France

Down Icon

« On peut parler de pillage » : président de la Ligue nationale de basket, Philippe Ausseur regrette l'exode de talents français vers les universités américaines

« On peut parler de pillage » : président de la Ligue nationale de basket, Philippe Ausseur regrette l'exode de talents français vers les universités américaines

Vous avez employé sur le site BeBasket le terme de « pillage » pour évoquer la situation avec la NCAA. Était-ce approprié ?Au vu du nombre de joueurs approchés, dont une quinzaine se sont engagés, on peut parler de pillage. Les facs ratissent large, jusqu'en Pro B, et nous dépossèdent d'un certain nombre de nos forces vives sans que l'on puisse réagir.

Depuis combien de temps la Ligue a-t-elle conscience du sujet ?On avait identifié la menace. Ce qui nous a pris par surprise, ce sont les montants. On s'attendait à des gros contrats à 350 000, c'est 2 millions... On s'attendait à une demi-douzaine de joueurs approchés, c'est plus du triple. Ces dernières semaines, nous avons fait le lien outre-Atlantique avec des représentants d'universités, et même si une décision de justice a posé un début de cadre, ce n'est pas aussi limpide que certains veulent le faire croire. Nous avons eu vent d'agents tentant de faire signer des attestations aux clubs pour démontrer que leurs joueurs étaient encore amateurs. Le flou persiste.

Le niveau du Championnat de France peut-il être impacté ?Notre Championnat est hybride, un amalgame entre joueurs confirmés d'Euroligue et jeunes talents. Le paradoxe est que l'on sera sans doute en mesure de garder les meilleurs, ceux qui ont la garantie d'être draftés haut en NBA. Mais les autres... Si on se les fait "capturer", il y aura un vrai sujet d'appauvrissement potentiel du niveau de la Ligue. Or, ces joueurs du deuxième marché peuvent prendre plus d'argent là-bas en un ou deux ans qu'en dix ans ici.

« Si un joueur part, il nous rapportera zéro. Il faut tout faire pour les garder »

Existe-t-il un danger pour la formation à la française ?Tout le monde sera perdant. Du point de vue de la NCAA, on peut se dire à court terme : je suis gagnant parce que je récupère ces joueurs à moindres frais, sans avoir eu besoin de les former. Or, ce faisant, le risque est que plus personne n'ait envie de faire ce travail. Supporter tous les coûts sans retour, cela n'est pas viable. Sur le long terme, c'est dangereux. On ne formera plus et le vivier se tarira.

Qu'est-ce qui peut être fait aux niveaux français et européen ?Tout est à construire au niveau réglementaire. Nous devons coordonner les solutions au niveau européen, car les législations sont différentes partout. La FIBA et l'ULEB y travaillent. Il faut préciser le cadre juridique des NIL (Name, Image, Likeness). Au niveau français, il y a l'angle contractuel. On doit militer pour que nos premiers contrats pros soient exonérés, pour redonner un peu d'oxygène. On doit faire toujours plus pour mettre en valeur nos talents - via notre programme prospects avec la NBA, le Young Star Game, ou une réforme des Championnats espoirs.

Mais on ne peut ignorer l'aspect économique. Nous avons plaidé cela auprès des députés et sénateurs : si un joueur part, il nous rapportera zéro. Il faut tout faire pour les garder. Nous avançons néanmoins sur un fil, car la NCAA n'est pas affiliée à la FIBA et il n'est pas certain que la Cour européenne nous suivrait si elle considérait que nos mesures empêcheraient une libre circulation des sportifs.

Est-ce qu'en ce sens, le phénomène NCAA pourrait devenir une sorte d'arrêt Bosman du basket ?Oui et non. Le lien est dans la déstructuration de l'équilibre de la régulation européenne, la NCAA étant un marché nouveau et sans limites par rapport à ce qu'on connaissait aujourd'hui. Mais si l'arrêt Bosman a éliminé les quotas d'étrangers, tous les joueurs sont restés en Europe. Là, on observe une fuite vers un autre continent, en sachant aussi que les joueurs ne pourront pas y passer toute leur carrière.

Êtes-vous confiant dans votre capacité à endiguer le phénomène ?Le coup est parti. Ce sera impossible cette saison. Je suis plus optimiste pour la suite, car j'ai ressenti une prise de conscience générale pour que le basket européen arrête de subir. Les différentes instances, FIBA, Ligues, NBA, et même USA Basketball ont engagé des discussions. On peut espérer aboutir à un cadre concret pour ce processus de transfert. Il est inutile de jeter l'opprobre sur nos jeunes ou de les stigmatiser. Il est compliqué de dire non aux offres qu'ils reçoivent. On peut parier que d'ici à deux ans le phénomène s'auto-régulera en partie. À nous d'apporter des réponses d'ici là. »

L'Équipe

L'Équipe

Nouvelles similaires

Toutes les actualités
Animated ArrowAnimated ArrowAnimated Arrow