Un an après les Jeux olympiques : vaste artifice que de raviver le passé

Quitte aime bien châtie bien, non ? Alors, un, deux, trois, c’est parti… A Libération nous avons aimé, comme beaucoup de Français, les Jeux olympiques. L’impertinence joyeuse de la cérémonie d’ouverture, les performances et l’adrénaline sportives, le sans-faute dans l’organisation, l’esprit de concorde qui avait envahi le pays, la féerie quotidienne, le soir venu aux Tuileries, quand la vasque s’élevait dans le ciel de Paris.
La vasque est de retour depuis le 21 juin et là, on aime moins. Offrir la possibilité à ceux qui n’avaient pas pu en profiter l’an passé relève d’une bonne intention. Mais quelque chose nous dit que ce n’est pas toujours dans les mêmes pots que se fabriquent les mêmes émotions. Et que dit de nous cette volonté de faire revivre, un peu artificiellement, un moment de grâce collective ? De rouvrir, puisque c’était l’expression consacrée l’an dernier, cette «parenthèse enchantée» ? Le propre d’une parenthèse est qu’elle se referme… La remarque vaut aussi pour les cérémonies et autres initiatives prises un peu partout pour fêter samedi les un an des JO. Certaines, comme l’installation dans le nord de la capitale des statues dorées des dix femmes ayant marqué l’histoire des combats féministes, sorties des eaux de la Seine l’an passé, sont une bonne idée. Mais il se dégage globalement un esprit un peu fake dans cette re-célébration sur commande.
Récit
Cette énergie mise à ranimer le passé n’a d’ailleurs d’égal que les difficultés traversées depuis un an pour préserver l’avenir du sport en France. L’héritage des JO de ce point de vue reste maigrelet. On a bien compris que les restrictions budgétaires allaient s’imposer à tous (quoique ?). Mais celles qui seront faites dans ce domaine vont favoriser un travers français : considérer le sport comme quantité négligeable. Développer la pratique sportive n’est toujours pas vu chez nous comme un investissement bénéfique. De la santé, physique ou mentale, au vivre ensemble, c’est pourtant une évidence. Mais il est plus facile de regonfler une vasque pour quelques mois que de miser, sur le long terme, sur des effets positifs sur les résultats scolaires, le moral de nos jeunes, des économies en matière de santé ou sur les dépenses sécuritaires. La convention citoyenne actuelle sur les temps de l’enfant peut être une occasion cet automne de reparler du rôle du sport. Mais on n’y mettrait pas une médaille à couper.
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