En direct, reconnaissance de l’Etat de Palestine : posez vos questions à Gilles Paris, éditorialiste au « Monde »

Posez votre question à la rédaction :
Gilles Paris, éditorialiste au Monde, ancien correspondant de la rédaction à Washington et à Jérusalem, se tient prêt à répondre à vos questions.
Dans les pays arabes, la reconnaissance officielle de la Palestine par la France mais aussi par le Luxembourg, Malte, Monaca et Andorre, dans la nuit n’a pas été tant relayée que cela puisqu’elle était attendue. En revanche, l’annonce, le 24 juillet faite par le président Emmanuel Macron, avait été saluée dans de nombreux pays arabes. Une décision qualifiée d’historique par l’Arabie saoudite, dans un article du média qatari Al-Arabiya English, daté du 25 juillet.
La chaîne qatarie Al-Jazira, avait aussi souligné l’importance diplomatique et politique de ce geste, attendu depuis longtemps le 21 septembre en se demandant tout de même « La reconnaissance de la Palestine est-elle un moyen pour les dirigeants occidentaux de “sauver la face” » ?
Le média qatari Gulf Times, dans un article à la même date, lui, est surtout revenu sur l’annonce dimanche par le Canada, le Royaume-Uni et le Portugal, de la reconnaissance d’un Etat palestinien. « Ce moment marque un tournant pour les Palestiniens et leurs ambitions d’obtenir un État : jusqu’à présent, les puissances occidentales les plus influentes soutenaient que cela ne devait intervenir que dans le cadre d’un accord de paix négocié avec Israël », insistait le média. « Bien qu’il s’agisse d’un geste largement symbolique, il place ces pays en désaccord avec les États-Unis et Israël », détaillait l’article.
« C’est le moment de la paix », titre Khaleej Times, un média basé à Dubai, qui reprend ici le discours du président français Emmanuel Macron hier à l’ONU. Le journal rappelle toutefois que malgré cette reconnaissance et l’organisation de ce sommet avec les chefs d’Etats de nombreux pays « aucun changement immédiat n’est attendu sur le terrain » alors qu’Israël poursuit son offensive meurtrière sur la bande de Gaza.
La chaîne Al-Jazira, a choisi, ce mardi de donner la parole à des Palestiniens vivant à Hébron et dans les environs. « Un choc pour Israël », « une vraie remise en cause du projet sioniste » et une « correction historique partielle ». D’autres évoquent « l’espoir » suscité par cette reconnaissance mais aussi leurs inquiétudes que cela n’accroisse la colère du gouvernement israélien.
Quelles peuvent être les conséquences de la reconnaissance de l’Etat de la Palestine par plusieurs pays, dont la France, le Royaume-Uni et le Canada ? Cette reconnaissance peut-elle avoir un effet sur l’offensive militaire israélienne à Gaza, récemment qualifiée de « génocide » par une commission d’enquête des Nations unies ? Pourquoi la communauté internationale ne prend-elle pas de sanctions contre Israël et pourquoi l’Assemblée générale des Nations unies ne décrète-t-elle pas le déploiement d’une force d’urgence multinationale ? Posez vos questions à Gilles Paris, éditorialiste au Monde et ancien correspondant à Jérusalem. Vous pouvez d’ores et déjà les lui adresser, sans oublier de mentionner le mot « TCHAT ».
Alors que la France, tout comme le Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre ont reconnu, dans la nuit, lors de l’Assemblée générale de l’ONU, un Etat Palestinien, la presse internationale n’a pas hésité à commenter le sujet.
« La France défie Trump », titre le Washington Post alors qu’Israël et les Etats-Unis avaient montré leur ferme opposition à cette reconnaissance. Le quotidien américain estime toutefois que cette annonce, si elle représente un « coup de pouce moral pour les Palestiniens », ne « changera rien sur le terrain ».
« Reconnaissance ou non, un Etat Palestinien semble plus lointain que jamais », estime de son côté le New York Times, qui n’hésite pas à rappeler le point de vue des Palestiniens qui, après près de deux ans d’une guerre qui a ravagé l’enclave et fait des dizaines de milliers de morts, assurent que la perspective d’une solution à deux Etats leur semble plus éloignée que jamais.
En Espagne, c’est notamment le discours d’Emmanuel Macron, qualifié de « parfaitement équilibré » par El Pais, qui a été analysé, alors que le président français a alterné entre les « allusions continues à Israël mais aussi les exhortations à mettre fin à ses opérations militaires dans la bande de Gaza ».
Un jeu d’équilibre particulièrement compliqué alors que le chef de la diplomatie italien, Antonio Tajani – tout comme le président américain, Donald Trump –, assure que « la reconnaissance de l’Etat de Palestine est un cadeau au Hamas », comme le souligne La Repubblica. Le journal italien rappelle, par ailleurs, que Giorgia Meloni n’était pas présente à New York alors que le pays se montre réticent sur la question de la reconnaissance.
Le Wall Street Journal, lui, se montre plus critique et estime que l’initiative d’Emmanuel Macron confirme surtout son « penchant à boxer bien au-delà de sa catégorie dans une région où l’influence de la France a diminué ».
« L’Allemagne devrait-elle reconnaître la Palestine comme un Etat ? », se demande de son côté le journal allemand Der Spiegel, alors que le ministre des affaires étrangères allemand, Johann Wadephul, avait rappelé, hier, sa position selon laquelle la reconnaissance d’un Etat palestinien ne doit survenir qu’à la fin du « processus » de la solution à deux Etats.
Dans un deuxième article, le média allemand n’hésite pas à critiquer l’absence à New York du chancelier allemand – officiellement parce qu’il doit être présent à Berlin pour présenter le budget 2026. Une « absence qui souligne aussi l’isolement croissant de l’Allemagne sur la scène internationale concernant le conflit israélo-palestinien », conclut l’article.
Le ministre des affaires étrangères belge, Maxime Prévot, a expliqué lundi que la reconnaissance de l’Etat de Palestine par la Belgique se ferait « en deux temps », illustrant des nuances entre les reconnaissances annoncées par Paris et Bruxelles.
« C’est une démarche en deux temps : une reconnaissance politique, qui est un signal diplomatique fort dès maintenant au vu des enjeux et attitudes d’Israël, a expliqué le ministre à RTL Info. Et viendra le moment de la formalisation légale par arrêté royal et ça, ça viendra dans un deuxième temps. »
Il a ajouté que cette reconnaissance juridique viendrait « quand les conditions seront réunies ». Ces conditions incluent notamment une libération des otages à Gaza, une démilitarisation du Hamas et des groupes palestiniens, l’organisation d’élections et une reconnaissance de l’Etat d’Israël par les pays arabes.
« La Belgique donne aujourd’hui un signal politique et diplomatique fort au monde », a déclaré le premier ministre belge, Bart De Wever, lors de son discours devant l’ONU. « Soyons toutefois clairs : cette démarche ne saurait être une récompense pour le Hamas », a-t-il ajouté. « La Belgique ne procédera à la reconnaissance juridique de l’Etat de Palestine qu’une fois tous les otages libérés et toutes les organisations terroristes, comme le Hamas, écartées de la gouvernance de la Palestine », a-t-il aussi précisé.

Le Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre ont également formellement franchi lundi le pas de la reconnaissance d’un Etat palestinien devant l’Assemblée générale annuelle des Nations unies, à New York, en l’absence des représentants d’Israël et des Etats-Unis.
Le premier ministre canadien, Mark Carney, a dit lundi ne se faire « aucune illusion » sur l’impact concret qu’aura la reconnaissance de l’Etat de Palestine, mais a jugé « nécessaire » de contrer un gouvernement israélien opposé à son existence.
« Nous ne nous faisons aucune illusion : cela n’est pas une panacée », a dit M. Carney lors d’un forum organisé par un centre de réflexion américain à New York, se disant conscient que l’annonce de la reconnaissance aura un effet limité, surtout face à l’opposition franche d’Israël et des Etats-Unis. Le premier ministre canadien l’a toutefois estimée « nécessaire », puisque la capacité « d’autodétermination du peuple palestinien est en train d’être effacée ».
« Alors que la politique déclarée du gouvernement israélien est qu’il n’y aura jamais d’Etat palestinien, (…) ce que nous essayons d’accomplir c’est de garder [la question de l’Etat palestinien] sur le devant de la scène », a-t-il expliqué. « Nous faisons ce que nous pouvons, tout en reconnaissant les limites », a ajouté M. Carney, qui a précisé que le Canada souhaitait voir l’émergence d’un « Etat palestinien sioniste », soutenant le droit d’Israël à exister.
Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, fervent critique de l’offensive israélienne à Gaza, a appelé lundi à l’adhésion pleine et entière d’un Etat palestinien à l’ONU, où les Palestiniens ont le statut d’observateurs. La conférence sur la solution à deux Etats, lors de laquelle la France et d’autres Etats ont reconnu l’Etat de Palestine, « n’est pas la fin du chemin, c’est seulement le début », a-t-il noté. « L’Etat de Palestine doit être membre de l’ONU », a-t-il plaidé, alors que cette adhésion pleine et entière a été bloquée par les Etats-Unis.
Le premier ministre égyptien, Moustafa Kemal Madbouly, a annoncé lundi que son pays accueillerait une conférence sur la reconstruction de Gaza dès qu’un cessez-le-feu serait en place dans le territoire palestinien ravagé.
« L’Egypte accueillera, dès qu’un cessez-le-feu sera trouvé, une conférence internationale de reconstruction de la bande de Gaza pour mobiliser les fonds nécessaires pour le plan de reconstruction arabo-islamique », a-t-il déclaré lors d’une conférence sur la solution à deux Etats, au siège de l’ONU à New York.
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Le 22/09 à 23:00 L’essentiel
- A la tribune de l’ONU, Emmanuel Macron a reconnu lundi l’Etat de Palestine au nom de la France, dans le cadre d’un mouvement historique mais à la portée encore avant tout symbolique. Le chef de l’Etat français était à l’initiative d’un sommet, présidé avec l’Arabie saoudite, sur l’avenir de la solution à deux Etats – l’aboutissement de plusieurs mois d’intense travail diplomatique pour rallier un maximum de pays et tenter de forger un plan de paix.
- L’établissement d’une ambassade de France dans le futur Etat palestinien sera conditionné à la libération « de tous les otages détenus à Gaza » et à un cessez-le-feu dans ce territoire, a également déclaré le président français à l’ONU.
- L’Autorité palestinienne a salué l’annonce officielle française, la qualifiant de décision « historique et courageuse ». Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a appelé lundi le Hamas à rendre les armes et condamné les attaques du mouvement palestinien du 7 octobre 2023 contre Israël, lors d’un discours en visioconférence à l’ONU.
- Pour Donald Trump, reconnaître l’Etat de Palestine est « une récompense pour le Hamas », a rapporté lundi sa porte-parole, Karoline Leavitt. Elle a ajouté que le président américain s’exprimerait mardi devant l’Assemblée générale des Nations unies et s’en prendrait aux « organisations mondialistes » qui ont « fait péricliter l’ordre mondial », ainsi qu’aux pays qui ont choisi de reconnaître l’Etat de Palestine. « Le Hamas est en fête aujourd’hui », a commenté de son côté l’ambassadeur américain à Paris, Charles Kushner.
- En France, au moins 86 mairies dirigées par la gauche – parmi lesquelles celles de Lyon, Rennes, Nantes et Saint-Denis –, ont hissé le drapeau palestinien au fronton de leur mairie, lundi, malgré l’opposition du ministère de l’intérieur.
- En Italie, plusieurs centaines de milliers de manifestants ont défilé dans les rues en solidarité avec les Palestiniens. Selon l’Unione sindacale di base, 500 000 personnes sont descendues dans la rue dans pas moins de 65 villes à travers la Péninsule.
- Dans la bande de Gaza, 46 personnes ont été tuées lundi par des bombardements israéliens, selon des sources médicales. Deux hôpitaux de la ville de Gaza ont été mis hors service en raison d’attaques à proximité, a rapporté le ministère de la santé local.
- Le ministère des affaires étrangères israélien a prévenu, lundi, qu’il ne permettrait pas à la flottille internationale pour Gaza de briser le blocus du territoire, l’accusant d’être « organisée par le Hamas » et de « servir [ses] intérêts »
Le secrétaire national du Parti communiste (PCF), Fabien Roussel, a salué une « victoire tardive », après l’annonce par le président Emmanuel Macron de la reconnaissance par la France de l’Etat de Palestine. « C’est une victoire irréversible du combat populaire pour le droit d’un peuple à disposer de lui-même », a estimé sur X le leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon. « Et c’est un meilleur rapport de force pour obtenir la fin des crimes et du génocide à Gaza si les nations concernées passent à la suite logique : l’isolement des agresseurs et leur disqualification dans tous les accords de coopération », a-t-il ajouté, renouvelant son appel à des sanctions contre Israël. « Ce 22 septembre est un jour historique, celui où la France s’honore en reconnaissant l’Etat de Palestine », a affirmé le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure.
A droite et au Rassemblement national (RN), le geste accompli par M. Macron a suscité des réserves, voire une opposition totale. « C’est le choix d’Emmanuel Macron, pas le mien. Mais ma conviction est qu’on ne peut reconnaître un Etat palestinien qu’avec les conditions réunies », a déclaré le ministre de l’intérieur et président des Républicains (LR), Bruno Retailleau, sur LCI. « Reconnaître un Etat palestinien sans conditions, ce n’est pas avancer vers la paix. C’est offrir une victoire au Hamas », a jugé le président LR des Hauts-de-France, Xavier Bertrand. Même accusation de faire le jeu du Hamas du côté du RN. « C’est le Hamastan qu’Emmanuel Macron reconnaît aujourd’hui, pas la Palestine », a accusé la leader du parti, Marine Le Pen.
Le 22/09 à 22:49 Pour approfondir
La Conférence pour le règlement pacifique de la question de la Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux Etats se poursuit. Une trentaine de chefs d’Etat et de ministres doivent prendre la parole.
Mahmoud Abbas, le président palestinien, a exprimé sa « profonde reconnaissance » pour la déclaration « historique » de New York. Il s’exprimait par visioconférence, les Etats-Unis ne lui ayant pas délivré de visa pour se rendre à New York. Cette déclaration marque « le début d’un chemin irréversible », a-t-il jugé, en réclamant un « cessez-le-feu permanent » afin de « garantir l’accès de l’aide humanitaire » à Gaza.

« Le Hamas n’aura aucun rôle dans le gouvernement, le Hamas et d’autres factions doivent rendre leurs armes à l’Autorité palestinienne », a-t-il affirmé. « Nous condamnons également les meurtres et la détention de civils, y compris les actes du Hamas le 7 octobre 2023 », a-t-il ajouté, alors qu’Israël accuse depuis près de deux ans les responsables palestiniens de ne pas condamner ces attaques.
« Ce que nous voulons, c’est un Etat unifié, sans armes », a-t-il assuré, en promettant « la transparence », un « Etat de droit » ou encore une « réforme du système financier ».
Le 22/09 à 21:55 Pour approfondir
Par Emmanuel Macron

[Emmanuel Macron a prononcé, lundi 22 septembre, un discours de la tribune des Nations unies dans lequel il a reconnu, au nom de la France, l’existence d’un Etat de Palestine. Nous en retranscrivons, ci-dessous, l’intégralité.]
« La solution à deux Etats, sur la base de frontières d’avant 1967 – avec Jérusalem comme capitale de ces deux Etats –, est la seule issue à ce cauchemar », a plaidé Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, alors que « la situation [à Gaza] est intolérable et se dégrade d’heure à heure ».
« Rien ne peut justifier les horribles attentats terroristes du 7 octobre perpétrés par le Hamas et la prise d’otages. Et rien ne peut justifier la punition collective infligée à la population de Gaza et toute forme de nettoyage ethnique. Rien ne saurait non plus excuser les événements en Cisjordanie, a-t-il poursuivi. L’expansion incessante des colonies, la menace rampante d’annexion, l’intensification des violences dans les colonies – tout cela doit cesser. »
L’État palestinien « est un droit, pas une récompense », et sans lui, il n’y aura « pas de paix » dans la région, a-t-il insisté.
Alors qu’Emmanuel Macron n’avait pas encore terminé son discours à la tribune de l’ONU, l’Autorité palestinienne a salué lundi soir l’annonce officielle par le chef de l’Etat de la reconnaissance de l’Etat de Palestine par la France, la qualifiant de décision « historique et courageuse ».
Le ministère des affaires étrangères palestinien se félicite dans un communiqué « de la reconnaissance par la République amie de France de l’Etat de Palestine et la considère comme une décision historique et courageuse conforme au droit international et aux résolutions des Nations unies, soutenant ainsi les efforts déployés pour atteindre la paix et mettre en œuvre la solution à deux Etats. »
Le ministère salue également « le rôle pionnier joué par la France et le président Macron en incitant de nombreux Etats » à réaliser la même reconnaissance.
S’exprimant juste après Emmanuel Macron, le ministre des affaires étrangères saoudien, Fayçal Ben Farhan, a appelé, dans un discours très succinct, tous les pays à reconnaître l’Etat palestinien après l’annonce formelle de la France lors du sommet que les deux pays président à l’ONU.
« Nous appelons les autres pays à prendre une mesure historique similaire qui aura un impact important pour soutenir les efforts vers la mise en place de la solution à deux Etats, parvenir à une paix totale au Moyen-Orient et trouver une nouvelle réalité où la région peut jouir de la paix, de la stabilité et de la prospérité », a-t-il déclaré à la tribune.
« La paix est beaucoup plus exigeante, beaucoup plus difficile que toutes les guerres. Mais le temps est venu », conclut Emmanuel Macron.
Le Monde