Politique. Près de dix ans après la fusion, l’Alsace rêve toujours de reconstituer une région à part

Le projet de loi de révision constitutionnelle sur l’autonomie de la Corse est venu raviver les frustrations et le sentiment d’injustice des défenseurs de la création d'une région Alsace. Ces derniers estiment ne pas être entendus par le gouvernement.
Même si ses deux premiers présidents élus (Philippe Richert et Jean Rottner) étaient Alsaciens et que son siège est à Strasbourg, la région Grand Est, née de la réforme territoriale décidée par François Hollande et de la fusion, le 1er janvier 2016, des anciennes régions Champagne-Ardenne, Lorraine et Alsace, n’a cessé d’être contestée dans sa partie la plus orientale.
En 2018, un sondage Ifop indiquait que 67 % des Alsaciens souhaitaient une sortie du Grand Est. Ce taux a augmenté au fil des années, à en croire un nouveau sondage du même institut, également commandé par des organisations pro-sortie du Grand Est et publié début juin : 72 % des Alsaciens se prononceraient désormais en faveur de la création d’une région Alsace hors du Grand Est, en cas de référendum sur cette question.
Si, à l’inverse d’autres régions françaises, cette question institutionnelle n’est pas un sujet de débat majeur au sein de la population alsacienne – fin juin, une enquête OpinionWay, commandée celle-là par la grande région, contenait pour sa part à 53 % la proportion des opposants alsaciens , les aînés y étant largement plus défavorables que les jeunes –, beaucoup d’élus alsaciens ont fait de cette sortie du Grand Est leur cheval de bataille , multipliant les appels à l’exécutif, propositions de loi, tribunes, manifestations…
La fusion des départements en compensationPour « reconnaître le fait alsacien », Emmanuel Macron a accepté la création, le 1 er janvier 2021, de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA), qui a fusionné les conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Présidée par Frédéric Bierry (LR), cette CEA a rapidement lancé une « consultation citoyenne » sur la sortie du Grand Est et la reconstitution d’une région Alsace, option qui a obtenu le soutien de 92 % des 153 844 participants.
Mais lors d’une visite à Strasbourg le 26 avril 2024, le président de la République a refusé de relancer « un grand jeu institutionnel », se disant seulement favorable à une négociation sur « certains transferts de compétences » du Grand Est vers la CEA, qui se rêve comme une région à part entière.
Le projet de loi de révision constitutionnelle sur l’autonomie de la Corse est venu raviver les frustrations et le sentiment d’injustice des défenseurs de cette « région Alsace ». Dans un communiqué publié le 30 juillet, après la présentation du projet en Conseil des ministres, Frédéric Bierry regrette que « le gouvernement s’entête à faire la sourde oreille à un projet d’expérimentation territoriale à l’échelle alsacienne qui ne demande pas l’autonomie, ne nécessite aucune révision constitutionnelle et respecte profondément l’unité de la République ».
De son côté, le sénateur André Reichardt (apparenté LR), président du Mouvement pour l’Alsace, s’indigne « d’un texte qui va aussi loin pour la Corse, alors qu’on passe par pertes et profits le territoire métropolitain, dont l’Alsace ».
Le Républicain Lorrain