RDC : le procureur de la CPI à Kinshasa pour enquêter sur les violences dans le Nord-Kivu
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Karim Khan est arrivé à Kinshasa lundi soir où il doit rencontrer le président congolais Félix Tshisekedi. La CPI veut documenter les crimes commis dans le Nord-Kivu, où les habitants signalent des exactions des rebelles comme des forces armées congolaises.
Renforcer la justice dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) peut-il aider à mettre fin au conflit ? C’est ce que veut croire Karim Khan. Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) est arrivé lundi soir à Kinshasa, la capitale, afin d’aborder le sujet des crimes commis dans le Nord-Kivu. Dans cette région voisine avec le Rwanda, le M23, soutenu par les forces rwandaises, continue sa progression entamée avec la prise de la ville de Goma le 25 janvier.
«Combien de générations de vos enfants vont être sacrifiées, ciblées ? Trop, c’est trop», a déclaré le procureur au micro de RFI après son arrivée dans la capitale congolaise. Selon la chaîne française, Karim Khan doit y rencontrer le chef de l’État Félix Tshisekedi ainsi que des membres du gouvernement, et Bintou Keita, représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies en RDC.
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Le conflit dans le Nord-Kivu, qui dure depuis plus de trente ans, connaît une résurgence depuis fin janvier avec la reprise des combats par les rebelles du M23. Ceux-ci, après Goma, ont continué leur route vers le Sud et pris Bukavu, autre ville-clé de la région, prenant par cette occasion le contrôle du lac Kivu. Des exactions, du côté des rebelles comme de l’armée régulière congolaise, ont été signalées en marge des combats. Certains habitants de Bukavu ont notamment évoqué, selon RFI, des actes de vandalisme et de violences de certains FARDC (forces congolaises) et des combattants wazalendo, des milices d’auto-défense. Face à ces signalements, le Procureur de la CPI, début février, a lancé un appel à témoins. Dès octobre dernier, Karim Khan avait aussi ouvert une enquête dans le Nord-Kivu à la demande des autorités congolaises.
Celle-ci a pour objectif de documenter les crimes commis dans l’Est depuis 2021. La CPI souhaite également soutenir la création d’un tribunal spécial en RDC. «Trop de gens se sont immiscés dans les affaires de ce pays, et ce, depuis des années», a encore déclaré Karim Khan, alors que Kigali soutient activement les rebelles qui contrôlent désormais une large partie de la région. «Nous tendons la main au gouvernement de la RDC. Nous souhaitons amener de nouveaux partenaires afin d’essayer d’instaurer une approche solide, compréhensive, durable et holistique à la justice qui éradiquera le poison de criminalité du sol congolais et qui permettra à vos enfants d’avoir un meilleur futur».
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Depuis janvier, le conflit dans l’est de la République démocratique du Congo a coûté la vie à plus de 7000 personnes, dont une part importante de civils, a déclaré lundi à Genève la première ministre Judith Suminwa Tuluka. «On n’a pas encore pu identifier l’ensemble de ces personnes, maintenant c’est très facile de dire que ces morts-là ne sont que des militaires», a-t-elle dit lors d’un point de presse en marge du Conseil des droits de l’homme. «La situation sécuritaire et humanitaire dans l’est de la RDC a atteint des niveaux alarmants», a-t-elle insisté un peu plus tôt devant le Conseil des droits de l’homme. La progression rapide du M23 et des forces rwandaises a provoqué la fuite de milliers de personnes, et le conflit a aggravé une situation humanitaire déjà catastrophique.
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