"Des études sont réalisées afin de déterminer l’ampleur des dégâts": à Draguignan, la (lente) bataille contre l’habitat indigne

Dans le centre ancien de Draguignan, certains immeubles sont en bien piètre état. Des enduits fissurés, des peintures fanées, parfois même l’infrastructure de l’habitation menace de s’effondrer.
À Draguignan, une dizaine d’immeubles sont concernés par des arrêtés de péril imminent, pris en 2024 et depuis le début de l’année 2025. "Ce sont des locataires, ou des propriétaires occupants, ou bien d’autres acteurs qui signalent des problèmes de la sorte, explique Sylvie Francin, adjointe au maire déléguée à l’habitat. Des études sont réalisées afin de déterminer l’ampleur des dégâts. En fonction, nous agissons avec une mise en sécurité."
Des renforts sont disposés sur les murs et planchers fragilisés et sur les fenêtres, notamment à l’aide d’étais. Si nécessaire, un relogement complet des habitants est réalisé.
Une rénovation prise en charge par les copropriétairesChaque immeuble fait l’objet d’un suivi par la municipalité. Parmi eux, le 38 boulevard de la Liberté, à proximité de la Brocante du Cœur. "C’est un dossier pour lequel les propriétaires sont actifs. Le nécessaire a été fait, rapporte Sylvie Francin. Nous suivons de près chaque dossier." De même pour l’immeuble situé 9 rue des Marchands, "pour lequel l’arrêté a été levé", indique l’élue. Pour le 54 rue de Trans, "l’immeuble a été vidé. Nous sommes en train d’étudier les capacités des propriétaires pour effectuer les travaux, notamment sur un plancher qui présente des risques importants", détaille Sylvie Francin.
"Lorsque ces bâtiments sont détenus par des particuliers, il y a une difficulté de taille: il faut que les travaux soient actés en assemblée générale. Mais surtout, les opérations doivent être intégralement provisionnées avant de pouvoir être lancées", explique Jean-Michel Cohen, directeur général de la Saiem Draguignan. "Les moyens des particuliers sont limités, cela demande encore plus de temps."
Une situation imputable à l’immeuble situé au 22 place du Marché: "L’agence Ferran gère avec le syndic de propriété. Des appels de fonds sont en cours."
Plus globalement, "il y a une véritable dynamique de rénovation urbaine de la part des propriétaires du centre ancien", note Sylvie Francin. Les demandes d’aides pour la réfection des toitures et des façades se multiplient. Depuis la première opération de Résorption de l’habitat insalubre (RHI), nous notons une hausse du prix du m² sur le quartier. »
Quid lorsque les propriétaires de ces immeubles n’ont pas les moyens financiers pour assurer les travaux?
La mairie et la Saiem en dernier recours"Il y a les travaux d’office en cas d’extrême urgence que la mairie peut diligenter, mais un titre de recouvrement sera adressé aux propriétaires de manière échelonnée, explique Sylvie Francin. Autrement, nous sommes obligés de racheter les immeubles pour ensuite pouvoir les rénover." La commune acquiert alors les biens en fond propre ou via la Saiem ou l’Établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d’azur (EPF Paca).
Objectif, réaménager l’intérieur des bâtisses en question ou bien les démolir pour les reconstruire. "C’est ce que nous avons fait sur la rue de l’Observance, en face de la fontaine, et sur la rue de Trans, là où se trouvent les Caboch’arts", illustre Jean-Michel Cohen, bailleur, mais aussi aménageur. "Quand un promoteur immobilier met quatre ans pour bâtir une résidence, nous en mettons minimum six pour réaménager un îlot."
La résorption de l’insalubrité au cœur de l’actionCar il faut déjà procéder à la sécurisation, mais aussi à l’acquisition. "Cela prend du temps car nous souhaitons acquérir ces biens à l’amiable auprès de chaque propriétaire, parfois il y a des indivisions ou des Sociétés civiles immobilières (SCI) avec de nombreux associés derrières. Ce qui rallonge les délais", détaille Sylvie Barbero, cheffe de projet à la Saiem. "Ces rachats se font à un prix réduit étant donné l’état du bien", précise Jean-Michel Cohen.
C’est notamment le cas des quatre immeubles rue de l’Observance, du n° 44 au 50, objets d’un nouvel arrêté de mise en sécurité le 22 mai dernier. "Ils font partie de l’îlot de l’Observance identifié par la mairie dans le cadre du programme de Résorption de l’habitat insalubre (RHI) sur lequel nous travaillons. Sur les quatre, ce sont les 46 et 48 qui posent le plus problème".
"Pour le moment, nous en sommes à la sécurisation et la consolidation des bâtiments. Des opérations éligibles à des demandes de subvention auprès de l’Agence nationale de l’habitat (Anah)", précise Sylvie Barbero. "Pour la rénovation ou la reconstruction, c’est à la charge de la commune ou de l’aménageur de payer", résume Jean-Michel Cohen. Une charge financière de taille. Et pour cause, les huit îlots intégrés au programme demandent un total de dépenses prévisionnelles de 10,94 millions d’euros hors taxe pour 7,6 millions d’euros estimés de recettes. La différence sera comblée par la Ville.
"L’Îlot Mireur, lequel concerne l’immeuble derrière le magasin de jouet de la place du Marché, mais aussi des bâtiments en face de l’église Saint-Michel", détaille Sylvie Barbero. "Dans ce dossier, nous avons des difficultés pour racheter l’ensemble des biens. Cela est un long processus auprès de chaque propriétaire. Nous avons aussi un patrimoine remarquable sur ce site, avec une tour de guet et des remparts."
Une ligne de crête à tenir, laquelle se fait plus sur la durée d’un marathon, plutôt qu’un sprint.
"Nous avons des îlots plus petits comme Grand Rue, au 17-19. Ici, nous avons pu tout racheter et rénover en agrandissant les surfaces des logements de une pièce à deux ou plus selon l’espace", décrit Jean-Michel Cohen. 91 logements sont concernés par nos opérations. Nous prévoyons d’en livrer 62. »
"Le centre ancien est connu pour ses habitations extrêmement petites, mais aussi avec des chambres borgnes, c’est-à-dire sans fenêtre. Nous devons ainsi tout repenser tout en conservant le caractère patrimonial du quartier, conclut Sylvie Francin. Ces opérations se font sur un temps très long, bien plus long qu’un mandat de maire."
Var-Matin