A69 : trois militants pro-autoroute condamnés, dans un climat de plus en plus violent envers les opposants au chantier

L’affaire tombe particulièrement mal. Alors que ce mardi 1er juillet, le préfet du Tarn annonce interdire par arrêté tout rassemblement d’opposants au chantier de construction de la future A69, entre Toulouse et Castres, en prévision d’une nouvelle mobilisation prévue pour le week-end, le même jour, trois individus âgés de 19 à 24 ans ont été placés en garde à vue, suspectés d’avoir dégradé une station d’irrigation de l’exploitation d’un agriculteur anti-A69 à Puylaurens (Tarn).
Le lendemain, dans le cadre d’une procédure de reconnaissance préalable, ils ont été condamnés par le tribunal judiciaire de Castres à quarante heures de travaux d’intérêt général. Parmi eux, le fils d’un sous-traitant important du concessionnaire chargé de la construction de l’A69… Pourtant, lors de l’audience, si les prévenus ont bien reconnu les faits qui leur étaient reprochés, ils ont précisé avoir agi uniquement sous l’effet de l’alcool et en aucun cas pour des raisons liées au projet autoroutier.
Ils ont aussi plaidé le hasard total pour expliquer pourquoi, dans la nuit du 28 juin, vers 4 heures du matin, ils se sont retrouvés dans le champ d’un opposant à l’A69 et se sont attaqués à son système d’irrigation. « Est-ce que ce n’est que le pur hasard ? C’est difficile à dire. Ce qui est certain, c’est que la victime avait été visée par une campagne de pression revendiquée par des pros A69 », réagit auprès de l’Humanité une source locale.
Une semaine auparavant, l’agriculteur et d’autres opposants à ce chantier d’autoroute très contesté avaient été ciblés par des affichages sur la voie publique. « Oui à l’A69, non aux voyous », pouvait-on lire à côté d’une dizaine de noms de militants anti-A69. Résultat des courses : un préjudice d’environ 80 000 € si l’on prend en compte l’impossibilité d’arroser les cultures durant la canicule et d’implanter les prochaines cultures maraîchères et céréalières.
Ce climat de violence contre des militants écologistes opposants à l’A69 n’est pas nouveau. Depuis un an, les intimidations, menaces et agressions se multiplient sans que les pouvoirs publics ne les enrayent. Le 2 septembre dernier, la maison d’une habitante de Verfeil, une commune située en Haute-Garonne, qui était sur le tracé de la future A69, avait été attaquée au cocktail Molotov par un commando de trois hommes cagoulés.
Depuis plusieurs semaines, des militants écolos étaient installés sur son terrain pour retarder la démolition de l’habitation et permettre à l’occupante d’être indemnisée correctement. Rencontrée deux semaines après l’attaque, Alexandra paraissait encore très marquée. « J’ai pensé à mon gosse qui dormait à l’intérieur. À ce qui se passerait si le feu s’attaquait à la maison… J’ai eu très peur », nous avait-elle confié.
Quelques jours après l’assaut du commando encagoulé, elle a également subi une coupure d’électricité. Le technicien d’Enedis venu en urgence sur place identifie vite le problème. « Un câble situé à plusieurs mètres de haut avait été sectionné. Une coupe nette et impossible à réaliser sans un engin de chantier. Au sol, il y avait d’ailleurs des traces de chenilles… Je me suis dit « stop, ça suffit ». Je signe ce qu’ils veulent », nous avait-elle raconté…
Le 16 septembre, elle rend finalement les clés des lieux, immédiatement transformés en « zone à défendre » – ZAD dans le jargon militant – par les anti-A69. Des attaques similaires avaient déjà eu lieu les mois précédents dans d’autres secteurs du chantier de l’autoroute.
Début 2024, à quelques kilomètres de là, plusieurs ZAD se constituent un peu partout sur le trajet de la future A69. Les deux plus importantes, la Cal’arbre et la Crem’arbre, sont situées sur la commune de Saïx. Selon le récit des militants à l’époque, ils sont très vite victimes de plusieurs caillassages et d’opérations clandestines contre leurs installations : « À la Cal’Arbre, au milieu de la nuit, nos dortoirs ont été incendiés et nos camarades caillassés. L’offensive est venue depuis la cimenterie attenante, avec le concours des vigiles et sous la surveillance de la gendarmerie, dont l’arrivée tardive n’a pas mis fin aux jets de projectiles ».
Le 25 mars, c’est une voiture d’un des écolos radicaux qui est prise pour cible. Et le 13 août, sur les coups de 3 heures du matin, trois individus encagoulés débarquent sur les lieux, et sont surpris par les occupants. L’un des membres du commando brandit « vraisemblablement un couteau, sous la gorge de notre ami pour l’empêcher de bouger » pendant qu’un autre asperge une « tente et [un] véhicule d’essence » et met le feu, raconteront les anti-A69. Au petit matin, le véhicule n’est plus qu’une carcasse fumante.
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