Affaire Bétharram: François Bayrou, entre attaques et "oubli" pendant ses cinq heures d'audition à l'Assemblée

Une audition marathon pour François Bayrou. Le Premier ministre a été interrogé pendant plus de cinq heures ce mercredi 14 mai par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'affaire des violences sexuelles et physiques à Notre-Dame-de-Bétharram.
Sous serment, le chef du gouvernement a multiplié les attaques contre la presse, le co-rapporteur insoumis Paul Vannier ou encore contre la lanceuse d'alerte Françoise Gullung. François Bayrou a aussi plaidé "l'oubli" devant cette commission.
Interrogé sur le rapport de l'inspection académique qui avait révélé des dysfonctionnements à Bétharram quand il était alors ministre de l'Éducation nationale en 1996, François Bayrou dit en "avoir oublié les termes".
Ce rapport assure qu'une inspection pédagogique avait déjà eu lieu dans l'établissement scolaire au cœur des années 1990. La conclusion de l'inspection indique que "Notre-Dame-de-Bétharram n’est pas un établissement où les élèves sont brutalisés."
La mission avait été commandé après une gifle d'un CPE à un élève de 5e. "Par un concours malheureux de circonstances, cet établissement vient de connaître des moments difficiles", est-il encore nuancé dans ce rapport. Celui-ci "a été pour moi une bouffée de sérénité, car j’en avais oublié les termes".
"Je n’avais pas de documents ni de notes. J’étais absolument dépourvu", avance ce mercredi le chef du gouvernement.
Ce rapport a été le sujet d'un débat entre la co-rapporteure Violette Spillebout qui "considère que c'est une enquête express, superficielle où ce sont principalement des professeurs et la direction qui ont été auditionnés".
Pour le Premier ministre, "il s'agissait d'une vraie vérification (...) avec l'audition de 20 personnes entre 9h30 et 18 heures".
Il a également dit n'avoir "aucun souvenir" d'être entré dans l'établissement ou d'avoir siégé au conseil d'administration, affirmant que "la mémoire de personne ne va que jusqu'à 40 années".
Le Premier ministre n'a pas hésité à attaquer plusieurs personnes pour se défendre au cours de l'audition. Il a directement mis en cause le travail de cette commission d'enquête parlementaire. Selon lui, les propos qui y sont tenus, notamment ceux de la lanceuse d'alerte Françoise Gullung, ne sont pas ceux que l'on peut trouver en ligne dans le compte-rendu de l'Assemblée nationale.
François Bayrou a dit "mettre en doute ceux qui rédigent" les comptes-rendus (les fonctionnaires de l'Assemblée NDLR) "et ceux qui contrôlent" l'action du gouvernement en désignant la commission d'enquête.

La co-rapporteure Violette Spillebout a défendu la commission d'enquête qui "n'est pas à charge".
"On peut avoir des divergences (...). Je ne souhaite pas qu'on mette en cause le travail de la commission d'enquête", a répondu la députée Renaissance au chef du gouvernement.
Elle a rappelé "avoir auditionné 140 personnes" et "récolté de nombreux documents".
François Bayrou a aussi accusé le co-rapporteur Paul Vannier de "déformer la réalité à chaque intervention" de ses propos. Le Premier ministre a insisté que "(s)a version n'a pas varié" et que les "affirmations" du député insoumis "sont biaisées". "Je ne laisserai pas prospérer la méthode du rapporter", s'est défendu François Bayrou. Plus tard, le Premier ministre a encore accusé Paul Vannier d'avoir mené une "campagne" l'ayant "ciblé" pour le "détruire".
À plusieurs reprises, le chef du gouvernement a attaqué les propos de Françoise Gullung, ex-professeure dans les années 1990 et lanceuse d'alerte dans cette affaire. François Bayrou s'est dit "sali" par "les affabulations sous serment" de son témoignage devant cette commission d'enquête. Françoise Gullung avait décrit une scène mettant en cause Élisabeth Bayrou, l'épouse de François Bayrou, qui y enseignait le catéchisme.
Enfin, le Premier ministre a attaqué Médiapart, alors que la commission s'est basée sur plusieurs enquêtes du média. Une méthode décriée par François Bayrou, dénonçant "des informations biaisées". Le Premier ministre a dénoncé une "méthode qui consiste à édifier Mediapart en autorité de la République".
"Je ne lis pas Mediapart, c’est une hygiène personnelle, vous, vous en faites la Bible et les prophètes!", a argumenté François Bayrou.
Vers la fin de son propos, François Bayrou a considéré que cette audition a pour but de "le coincer pour l'obliger à démissionner". "Vous ne m'avez interrogé que sur moi, sur ma responsabilité, sur ce que j'avais fait ou pas fait, sur le soupçon d'être intervenu, soupçon insupportable, dans l'affaire pour protéger des pédocriminels. Toute l'audition a tourné autour de ça", s'est plaint le Premier ministre. Ce dernier a précisé qu'il "aurait préféré qu'on parle des victimes".
"Il s'agissait d'une chose, pardon de parler un peu trivialement, il s'agissait de me coincer pour m'obliger à démissionner", a déploré le chef du gouvernement.
"Je suis l'accusé dans cette affaire? Je vous ai entendu dire dix fois 'nous ne sommes pas un tribunal'. Vous vous comportez comment là? Vous essayez de nourrir un scandale avec des méthodes (...) grossières et faibles", a aussi déploré François Bayrou, en s'adressant à Paul Vannier.
Au terme de son audition, François Bayrou a salué "un moment libérateur" et s'est félicité d'avoir "montré que tout était sans fondement".
BFM TV