Budget 2026 : entre cure d’austérité pour le peuple et hausse des dépenses militaires, François Bayrou s’expose à la censure du Parlement

Treillis verts, année blanche. Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé, à la veille des célébrations du 14 Juillet, lors de son traditionnel discours aux armées, son intention d’augmenter le budget militaire de la France de 3,5 milliards d’euros en 2026 et de 3 milliards d’euros supplémentaires l’année suivante – soit « 64 milliards d’euros pour notre défense en 2027 » –, François Bayrou s’apprête, mardi 15 juillet, à dévoiler les différentes économies pour l’année à venir.
Une véritable cure d’austérité si la piste d’une coupe de 40 milliards d’euros se concrétise. Un budget explosif ! D’autant que le premier ministre est tenu par le président de la République d’inscrire son plan dans la droite ligne des mantras macronistes, résumés en deux formules : ne pas augmenter les impôts et épargner les entreprises.
La mission confiée à Matignon est à la fois simple et particulièrement délicate : réduire coûte que coûte le déficit de la France, attendu à 5,4 % du PIB en 2025 et à 4,6 % en 2026, pour atteindre 3 % en 2029. Selon le ministère de l’Économie, en 2024, les recettes de l’État s’élevaient à « 1 501,6 milliards d’euros, tandis que le montant global des dépenses des administrations publiques était de 1 670,2 milliards d’euros, aboutissant à un solde négatif de 168,6 milliards d’euros », peut-on lire sur son site Internet.
Cette situation économique peut conduire à deux analyses : ce déficit résulte soit d’une baisse des recettes, soit d’une augmentation des dépenses publiques. L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a apporté une première réponse.
Selon une note publiée vendredi 11 juillet, « cette dégradation n’est pas attribuable à une augmentation plus marquée des dépenses publiques en France (…), mais plutôt à une diminution significative des recettes publiques françaises » depuis 2019.
Conséquence de la suppression de la taxe d’habitation pour les ménages et de la baisse des cotisations sociales patronales pour les entreprises, selon l’OFCE. Peu importe pour François Bayrou, bien décidé à sabrer net dans les dépenses de l’État.
Première piste sur la table : décréter une année blanche, ce qui consisterait à reconduire en 2026 les montants des prestations sociales indexées à leur valeur de 2025, sans revalorisation. La commission des Finances du Sénat estime que ce gel rapporterait 10 milliards d’euros, tandis que l’OFCE table plutôt sur 6 milliards. Autre cible dans le viseur : la protection sociale.
Le gouvernement envisagerait de s’attaquer à l’assurance-maladie par le renforcement de la lutte contre les fraudes, une réforme des indemnités journalières ou une réduction du remboursement de certains soins. Selon Politico, le régime des affections de longue durée (ALD) serait concerné. Ces différents leviers pourraient permettre d’économiser 3,9 milliards d’euros, selon l’assurance-maladie.
Les retraités seraient également mis à contribution, soit par la désindexation des pensions, soit par une hausse de la CSG. Selon Les Échos, les règles de l’assurance-chômage pourraient être une nouvelle fois durcies, l’ex-premier ministre Gabriel Attal ayant proposé de remettre sa réforme (enterrée par la dissolution) sur la table. Les aides aux entreprises feront-elles aussi partie des victimes de François Bayrou ?
Selon un rapport sénatorial, elles se sont élevées à 211 milliards d’euros en 2023, creusant un trou béant dans le budget de l’État que le chef du gouvernement ne semble pas pressé de combler. Pis, selon Politico, pour « acheter l’adhésion du monde économique », d’après un conseiller de Bercy, des allègements de « charges » seraient prévus.
Ces pistes ont mis la gauche sur le pied de guerre. Sur X, François Ruffin s’est indigné en entendant Emmanuel Macron réclamer au pays de se serrer la ceinture, pour mieux rediriger les crédits vers le secteur militaire : « L’homme qui a creusé le déficit comme jamais, qui a couvert d’or ses amis les nantis, réclame des « efforts » aux Français », déplore le député.
Auprès de l’Humanité, Léon Deffontaines, porte-parole du PCF, dénonce le choix de faire porter « sur les plus précaires l’effort de guerre et l’austérité. L’année blanche et le gel des pensions seraient un coup porté aux Français alors qu’ils peinent déjà à joindre les deux bouts et à partir en vacances ».
Et de prévenir : « C’est une ligne rouge, notre groupe se réserve évidemment le droit de censurer le gouvernement à l’automne, a fortiori s’il tente de passer en force par 49.3. » Le RN, qui n’a pas censuré Bayrou jusqu’ici, a fait part de son désaccord farouche face à l’option d’une année blanche et agite lui aussi l’arme de la censure. C’est dans une même configuration que Michel Barnier avait chuté, l’an dernier. Avant d’agiter la guerre, la Macronie devra gagner la bataille du Parlement.
Nous ne sommes financés par aucun milliardaire. Et nous en sommes fiers ! Mais nous sommes confrontés à des défis financiers constants. Soutenez-nous ! Votre don sera défiscalisé : donner 5€ vous reviendra à 1.65€. Le prix d’un café.Je veux en savoir plus !
L'Humanité