Chasse au trésor au Puy du Fou : à la recherche de toujours plus de propagande réactionnaire

Alors que la plus longue chasse au trésor en France, la Chouette d’or, s’est conclut il y a quelques mois, avec son lot de polémiques, le parc du Puy du Fou a annoncé jeudi 22 mai le lancement de sa propre quête : « Exkalibur​ ». Le parc vendéen fondé par le catholique traditionaliste Philippe de Villiers invite ainsi à trouver la légendaire épée du roi Arthur, en or et ornée de pierres précieuses, estimée à 250 000 euros et cachée en Europe de l’Ouest. Si les chercheurs de trésors et les médias se réjouissent de cette nouvelle aventure, il s’agit surtout d’une nouvelle stratégie du Puy du Fou pour étendre sa réécriture de l’histoire pour en faire un outil de propagande réactionnaire.

Le parc, fondé par le clan de Villiers, accueille des millions de visiteurs tous les ans (2,34 en 2023, 2,5 en 2024 et 2,8 en 2024), propageant déjà sa vision de l’histoire à beaucoup (trop) de personnes. La direction du parc n’a de cesse de tenter d’étendre son emprise sur le récit national, notamment à l’international. Création de parcs et de spectacles s’inspirant du Puy du Fou en Russie, en Espagne, en Tunisie, en Hongrie, aux Pays-Bas, au Japon, en Chine, bientôt au Royaume-Uni au Brésil… la mondialisation du Puy du fou et de sa vision de l’histoire n’a de cesse de progresser.

Cette annonce d’une grande chasse au trésor mobilisant les légendes arthuriennes semble donc n’être qu’un nouvel outil de propagande. Pour rappel, Philippe de Villiers, fondateur du parc et dont le fils Nicolas de Villiers est l’actuel président du parc, est un catholique traditionaliste, monarchiste et soutient d’Éric Zemmour à l’élection présidentielle de 2022. Dans l’ouvrage Le Puy du Faux, enquête sur un parc qui déforme l’histoire, quatre historiens démontraient les nombreuses fautes et anachronismes d’un parc qui se cherche pourtant la vraisemblance dès lors qu’il aborde un événement réel.

Les approximations historiques des objets de culture populaire ne sont pas l’apanage du parc vendéen. Le réel problème du Puy du Fou est que ces « erreurs » servent sciemment un projet politique réactionnaire. Pour le médiéviste Florian Besson, la spécialiste de la Rome antique Pauline Ducret, l’historien de la Révolution française Guillaume Lancereau et l’experte du XIXe siècle Mathilde Larrère, le parc tend à montrer que la France est sans cesse à sauver, à travers un roman national fantasmé et « une lecture contre-révolutionnaire et antimoderne » qui promeut « la grandeur de la royauté française », la « supériorité du catholicisme » et « ne cesse de marteler des valeurs anti-universalistes ».

Ces historiens sont loin d’être les seuls à critiquer le parc et les ambitions politiques de ses dirigeants. Michel Vovelle, professeur d’histoire de la Révolution française à l’université Panthéon-Sorbonne et militant communiste qualifie le Puy du Fou de « spectaculaire révision de la Révolution française » proposant une « vision passéiste du monde et une mémoire qui est loin d’être innocente ». « Derrière son ambiance bon enfant, le parc de loisirs n’hésite pas à instrumentaliser l’histoire française à des fins politiques » avec « un projet précis : celui de leur concepteur, un certain Philippe de Villiers », estime le spécialiste de la Révolution française Guillaume Mazeau.

Patrick Boucheron, Jean-Clément Martin, Valérie Sottocasa, Jean-Clément Martin, Charles Suaud… Les spécialistes de l’histoire antique, médiévale, moderne et contemporaine sont très critiques envers le parc et la vision de l’histoire qu’il véhicule. En 2022, Philippe de Villiers lui-même disait mener « un combat culturel », et prétendait avoir « fait passer plus d’idées par le Puy » qu’en étant candidat à la présidentielle.