Fumée blanche “historique” à Gibraltar : l’accord post-Brexit est “enfin” conclu

La nouvelle tombe comme un cadeau d’anniversaire, remarque le journal espagnol La Vanguardia. “Alors que nous étions sur le point de fêter les neuf ans du référendum lors duquel les Britanniques ont voté en faveur d’une sortie de l’Union européenne”, le Royaume-Uni, l’Espagne et la Commission européenne ont “enfin” conclu, mercredi 11 juin, “le tant attendu accord sur Gibraltar”.
Qualifié d’“historique”, cet accord “politique” établit les bases de “l’intégration du Rocher dans l’espace communautaire”, résume le site espagnol El Economista. “Il prévoit la suppression de toutes les barrières physiques, les vérifications et les contrôles des personnes et des marchandises qui circulent entre l’Espagne et Gibraltar, tout en préservant l’espace Schengen, le marché unique de l’UE et l’union douanière”, développe le média d’affaires.
Le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne en janvier 2021, laissant en suspens le statut de Gibraltar, enclave britannique située à la pointe sud de la péninsule Ibérique. Un accord-cadre avait été trouvé à l’époque pour garantir la libre circulation des biens à la frontière entre l’Espagne et le Rocher. Cependant, la signature d’un accord définitif peinait à se concrétiser, alors que Gibraltar avait voté à 96 % en faveur du maintien du Royaume-Uni dans l’UE.
“L’un des points les plus sensibles” des négociations concernait “les contrôles frontaliers entre Gibraltar et l’Espagne”, qui affectaient chaque jour les quelque “15 000 travailleurs transfrontaliers” traversant “la verja” [la frontière] en provenance de la commune espagnole de La Línea de la Concepción, contextualise le portail d’information madrilène El Confidencial.
Dorénavant, selon l’accord conclu mercredi, “des doubles contrôles frontaliers” seront instaurés “au port et à l’aéroport de Gibraltar”, relate El Economista. “Du côté de l’Union européenne, l’Espagne réalisera tous les contrôles prévus par Schengen. Du côté britannique, les contrôles à Gibraltar resteront inchangés.”
Les parties ont également convenu “de dispositions relatives aux visas et aux permis, ainsi qu’une étroite collaboration entre les autorités policières et judiciaires”, ajoute El Economista. “Cela ne manquera pas de susciter la colère des conservateurs britanniques, qui ont toujours estimé que l’implication d’agents espagnols constituerait une atteinte à la souveraineté nationale”, sachant que Londres s’apprête déjà à céder les îles Chagos à l’île Maurice, note La Vanguardia.
Le quotidien barcelonais a vu juste. “Cet arrangement veut concrètement dire que les Britanniques qui arrivent sur le Rocher par les airs devront montrer leur passeport aux agents espagnols ou estampillés UE”, grince The Daily Telegraph, quotidien londonien eurosceptique, “alors qu’ils se trouvent dans un territoire britannique”, souligne, agacé, le Daily Mail. Le tabloïd pro-Brexit se demande même si le Premier ministre travailliste, Keir Starmer, ne “vient-il [pas] de céder Gibraltar ?”
Le journal The Guardian lui garantit que “l’accord n’affecte en rien le statut de Gibraltar, qui demeure un territoire britannique d’outre-mer”, tandis que The Daily Telegraph explique que :
“Le système sera similaire à celui qui est en vigueur à la gare de St Pancras, à Londres, où les passagers de l’Eurostar doivent se présenter successivement à la police des frontières britannique, puis aux agents français, pour assurer une sortie fluide une fois arrivés à destination.”
Tout au long des négociations, retrace El Confidencial, “personne ne souhait [ait] fermer une frontière qui ébranlerait à ce point l’économie du Rocher et des régions espagnoles alentours. Mais dans le même temps, personne ne souhait [ait] signer la moindre clause, le moindre point, la moindre virgule qui pourrait affecter la question de la souveraineté dans un traité international”.
C’est désormais de l’histoire ancienne, conclut El Confidencial, qui précise que les discussions ont connu un second souffle après l’arrivée de Keir Starmer à la tête du gouvernement britannique, à l’été 2024.
Courrier International