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Municipales: pourquoi la réforme du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille devrait faire l'unanimité contre elle au Sénat

Municipales: pourquoi la réforme du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille devrait faire l'unanimité contre elle au Sénat
La chambre haute se penche ce 3 juin sur le changement du mode de scrutin pour les élections municipales à Paris, Lyon et Marseille. Si Rachida Dati espère que les sénateurs diront oui à cette proposition de loi qu'elle voit comme une chance de gagner la capitale en mars 2026, la chambre haute y est farouchement opposée.

Faire l'unanimité contre elle. La proposition de loi sur la réforme du scrutin des élections municipales à Paris, Lyon et Marseille arrive ce mardi 3 juin au Sénat. Suivie de très près par la ministre de la Culture Rachida Dati qui est candidate pour conquérir la capitale aux prochaines municipales en 2026, elle n'a quasiment aucune chance d'être adoptée par la chambre haute.

"Rien n'a été préparé avec nous alors qu'on représente les collectivités. J'ai vraiment du mal à comprendre qu'on débatte de ça alors qu'il y a bien d'autres urgences", tance le sénateur écologiste Thomas Dossus auprès de BFMTV.

Preuve que l'heure est à l'embarras dans le camp du gouvernement: ni Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur et à ce titre en charge de l'organisation des élections ne viendra défendre ce texte devant la chambre haute qu'il connaît pourtant très bien pour y avoir présidé le groupe LR pendant des années.

Son ministre délégué François-Noël Buffet, ancien président de la prestigieuse commission des Lois au Sénat, ne sera pas non plus présent. Tout comme en avril dernier, c'est le ministre des Relations avec le Parlement qui essaiera de convaincre les sénateurs.

Promise par François Bayrou, portée à l'Assemblée nationale par le député Renaissance Sylvain Maillard, cette proposition de loi vise à modifier la façon dont les maires parisien, lyonnais et marseillais sont élus.

Problème: les sénateurs étant élus par les élus locaux, tout changement dans leur mode de désignation impacte forcément le devenir des élus de la chambre haute.

"Personne ne le dira tout de go mais si ce texte passe, on pourrait se retrouver avec zéro sénateur LR à Paris", résume un parlementaire qui suit de près le dossier. Un casus belli pour le parti qui détient près d'un tiers des troupes au Sénat.

Depuis 1982, Paris, Lyon et Marseille disposent d'un mode de scrutin particulier. Là où dans toutes les autres communes, les électeurs votent à l'échelle de tout le territoire, les citoyens se prononcent arrondissement par arrondissement ou secteur par secteur dans ces 3 grandes villes.

Concrètement, une partie des conseillers ainsi élus vont siéger au conseil municipal de la ville et élisent le futur maire. Mais la clef de répartition peut parfois aboutir à l'élection d'un édile qui n'est pas forcément celui pour lequel le plus grand nombre d'habitants a voté.

Ce fut par exemple le cas à Marseille en 1983. Le maire socialiste Gaston Defferre a été réélu alors qu'il avait obtenu au second tour 10.000 voix de moins que Jean-Claude Gaudin (LR). De quoi convaincre le député Renaissance Sylvain Maillard, qui a défendu cette proposition de loi à l'Assemblée, de "mettre fin à cette anomalie démocratique".

Dans une unanimité très rare, La France insoumise tout comme le Rassemblement national ont partagé ces arguments dans l'hémicycle. Résultat: en dépit de débats houleux, la réforme du mode de scrutin a été largement adoptée à l'Assemblée nationale avec 183 voix contre 53.

Mais au Sénat, l'atmosphère devrait être toute autre. La commission des lois a largement rejeté cette proposition de loi en commission le 24 avril dernier, tant du côté des socialistes que des LR.

Et tant pis si la droite qui dirige la chambre haute avec l'UDI fait une mauvaise manière à Rachida Dati, pourtant issue de son propre camp.

Si la ministre de la Culture défend ce texte, c'est parce que certains estiment que ce nouveau système électoral favoriserait les arrondissements les plus peuplés et qu’il suffirait donc de décrocher quelques arrondissements-clefs pour s’assurer une majorité électorale au Conseil de Paris.

"Avec de la popularité, c'est plus facile de décrocher des gros arrondissements et de donc gagner. Le même calcul est fait pour Jean-Michel Aulas à Paris (potentiel candidat à Lyon pour Renaissance NDLR)", analyse le sénateur LR du Rhône Etienne Blanc.

Mais à la chambre haute, rares sont les soutiens de Rachida Dati, à l'exception de la sénatrice Catherine Dumas. D'autant plus que le chef de file de la droite sur ce texte est Francis Szpiner, opposant notoire à la ministre de la Culture qui a officialisé sa candidature pour représenter la droite aux prochaines municipales. Les sénateurs macronistes, eux, qui sont à peine 19, devraient probablement s'abstenir.

Quant à Bruno Retailleau, très écouté au Sénat, il a déjà expliqué être "très circonspect" sur la modification du scrutin pour Lyon, Paris et Marseille, pointant notamment du doigt le calendrier de la modification du scrutin, 9 mois à peine avant les municipales.

"Personne ne va brûler sa chemise pour Rachida Dati, ici, c'est certain, ni à droite ni parmi les macronistes", analyse un sénateur qui suit de près le dossier.

Du côté de la ministre de la Culture, on assure que cette proposition de loi "n'est pas pour elle mais pour les Lyonnais, les Parisiens et les Marseillais".

Dans l'entourage du ministre des Relations avec le Parlement Patrick Mignola, on joue une autre carte, celle de la cohérence, en rappelant que les sénateurs avaient farouchement lutté contre la modification du mode de scrutin en 1983.

"Ce serait quand même baroque que des sénateurs qui ont agoni d'injures ce texte à l'époque soient désormais contre sa modificiation", avance l'un de ses proches qui explique toujours croire possible de "trouver une piste d'atterrisage" pour le texte.

En cas de rejet par les sénateurs de cette proposition de loi, hypothèse la plus probable sur la table, François Bayrou aurait plusieurs choix, à commencer par celui d'acter le dissensus et d'enterrer cette proposition de loi.

Autre possibilité: convoquer malgré tout une commission mixte paritaire avant de renvoyer le texte devant l'Assemblée pour une lecture définitive. La proposition de loi serait alors adoptée et le mode de scrutin changé pour le jour J des élections.

François Bayrou ira-t-il vraiment au bras de fer, alors même que ses relations avec le Sénat sont très cordiales, une chance pour lui face à une Assemblée nationale très fragmentée?

"Vous me pardonnerez ma naïveté mais j'ai entendu le Premier ministre dire qu'il ne s'obstinerait pas en l'absence de consensus, et je l'imagine mal renier sa parole", avait déjà lancé en guise d'avertissement lors des travaux de la commission des lois le sénateur LR Francis Szpiner.

BFM TV

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