L'avenir de la politique de cohésion
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La politique de cohésion est la principale politique d’investissement de l’Union européenne et a été l’un de ses principaux moteurs de développement économique et social. Rien qu'au cours du dernier cadre financier, entre 2014 et 2020, cette politique a soutenu 4,4 millions d'entreprises et généré plus de 370 000 emplois, ce qui représente environ 13 % de l'investissement public total de l'Union.
Au Portugal, l’impact est évident. Portugal 2020, le programme de cohésion pour 2014-2020, a contribué à réduire les disparités régionales en finançant des projets d’innovation, d’emploi et de transition énergétique. Plus de 26 milliards d’euros ont été alloués à notre pays à travers 400 000 projets différents, dont 86 % dans les régions les moins développées, valorisant les investissements dans ces régions et permettant au pays de s’aligner sur les objectifs européens en termes d’emploi, de lutte contre la pauvreté, d’éducation, d’innovation et d’efficacité énergétique.
Mais la cohésion ne se limite pas à la croissance économique. Il s’agit de la stabilité de l’UE elle-même. Ces investissements visent à promouvoir la réduction des inégalités entre les régions, en garantissant que toutes les zones, y compris les zones rurales et ultrapériphériques, puissent participer pleinement au marché unique européen.
Au Parlement européen, nous avons déjà lancé le débat sur l’avenir de la politique de cohésion après 2027, lorsque le cadre financier pluriannuel actuel prendra fin. Deux des priorités que nous, socialistes, défendons pour l’avenir de cet instrument sont la réponse à la crise du logement et le soutien à l’industrie automobile.
Entre 2010 et 2023, les prix de l’immobilier dans l’UE ont augmenté de 48 % et les loyers de 22 %, rendant la vie difficile non seulement pour les familles à faibles revenus, mais aussi pour la classe moyenne et les jeunes. Nous avons besoin d’une stratégie européenne du logement dotée d’un financement solide au titre de la politique de cohésion pour soutenir la construction de nouveaux logements et la rénovation du parc de logements existant. Ce soutien ne doit pas se limiter à des critères étroits : il faut un engagement à long terme qui permette aux régions d’adapter les investissements à leurs réalités locales, sans imposer un modèle unique conçu depuis Bruxelles.
L’industrie automobile européenne peut également être repensée de cette manière. Une industrie en crise, marquée par la concurrence mondiale et la nécessité de s'adapter aux nouvelles normes environnementales. Dans plusieurs régions, notamment celles qui dépendent fortement de la production de composants et de véhicules à moteur à combustion, des milliers d’emplois sont menacés, notamment au Portugal, qui a produit en 2023 plus de 300 000 véhicules. En outre, plus de 90 % des voitures produites dans l’UE ont au moins un composant fabriqué dans notre pays, dans une chaîne de valeur dont dépendent des centaines de petites et moyennes entreprises. La politique de cohésion peut jouer un rôle central à cet égard, en finançant la reconversion des travailleurs et l’adaptation de l’industrie à la concurrence sur le marché mondial, notamment dans le segment des véhicules électriques.
L’une des menaces potentielles pesant sur cet instrument est venue des informations selon lesquelles la Commission européenne se préparait à centraliser la politique de cohésion , en accordant davantage de pouvoirs aux gouvernements nationaux et en réduisant l’intervention des autorités locales et régionales dans sa définition et sa gestion. Cette centralisation comporterait un risque important car, en méconnaissant le principe de subsidiarité, elle limite la capacité à définir les priorités stratégiques et à adapter les investissements aux réalités régionales.
Un autre aspect essentiel est l’utilisation systématique de la politique de cohésion pour répondre aux crises, comme cela s’est produit lorsque les fonds de cohésion ont été mobilisés pour lutter contre la pandémie ou soutenir l’Ukraine. Cette approche supprime le financement des projets structurels, qui nécessitent un instrument prévisible et axé sur le long terme. En ce sens, j’ai soutenu que la politique de cohésion doit maintenir sa fonction première de réduction des inégalités sociales, économiques et territoriales entre toutes les régions de l’Union européenne. Pour répondre aux crises ou aux événements inattendus, il faut créer un mécanisme permanent de réponse aux crises, doté de son propre financement, qui ne prive pas la politique de cohésion de fonds.
Comme nous le savons, au Portugal, la politique de cohésion est un instrument éprouvé et a été fondamentale dans le développement de notre pays. Mais surtout, il ne se limite pas à un instrument de solidarité, car il bénéficie à tous ceux qui participent au marché intérieur, qu’ils soient ou non les bénéficiaires directs des fonds. Elle profite à la fois à l’État membre qui utilise les fonds de cohésion pour un investissement et à l’État membre qui lui fournit des biens ou des services pour le réaliser. Notre vision de l’avenir de la politique de cohésion implique donc un instrument décentralisé, capable de répondre aux défis structurels, de lutter contre les inégalités entre les régions et avec une perspective à long terme.
L'auteur écrit selon le nouvel accord orthographique
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