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"Je suis très exigeant avec moi-même et avec les autres": l’ambition "dévorante" de Bernard Lemaitre, président du RCT

"Je suis très exigeant avec moi-même et avec les autres": l’ambition "dévorante" de Bernard Lemaitre, président du RCT

Alors que les joueurs sont partis en vacances, et que Pierre Mignoni et son staff bouclent leurs derniers dossiers avant de couper quelques jours, Bernard Lemaitre est lui toujours fidèle au poste.

Depuis son bureau du RCT Campus, où il a une vue imprenable sur une pelouse d’entraînement bien trop vide depuis l’élimination face à Bordeaux-Bègles, le président toulonnais a accepté de nous recevoir jeudi dernier.

Déçu, mais toujours combatif, l’homme d’affaires de 86 ans pense déjà à la suite.

On vous retrouve cinq jours après la défaite en demi-finale face à Bordeaux. Comment allez-vous?

J’ai pris un gros coup sur la tête à Lyon. Quand on est convaincu qu’on va passer l’obstacle et qu’on voit ce qu’on a vu, on est déçu. Pour les joueurs, le staff, le coach, les supporters, le club… Après, la raison revient. Et on se dit qu’on a fait dans l’ensemble une saison plutôt positive. Il y a du progrès, des motifs de satisfaction, des déceptions. Mais le club a franchi une étape de plus vers son désir d’accession au titre.

Vous aimeriez griller les étapes, mais on note une progression de saison en saison…

Oui, il y a une progression, mais c’est dans mon rôle de vouloir qu’elle aille plus vite. Si un élève passe de 10 à 12/20, il a progressé. Si, au cours de l’année et en fonction de son carnet scolaire, il pouvait espérer un 14, il y a un poil de déception. Il nous reste donc des progrès à faire dans certains domaines. Disons qu’on est en progression constante. Mais je suis très exigeant avec moi-même et avec les autres, et j’ai une ambition dévorante.

Dans les manques, pensez-vous notamment au leadership?

Pour moi, cette équipe a deux-trois vrais leaders, mais ils sont trop isolés. Il y a un écart trop grand entre ces leaders et le reste de la troupe… Certains peuvent progresser en ce sens car, pour l’instant, dans les situations critiques, ils n’y sont pas. Quand il faut prendre des décisions, avoir des attitudes et des actions déterminantes, si vous n’êtes pas suivi, ça devient compliqué.

Considérez-vous que le club a progressé depuis votre arrivée comme président?

Il y a une différence fondamentale, qui n’est pas du tout une critique, entre mon prédécesseur Mourad Boudjellal et moi. J’ai le sentiment qu’il construisait surtout une équipe pour gagner. C’était son but. Et c’était un noble but! Mais moi, je reconstruis un club. Forcément, ce n’est pas le même processus. C’est plus lent, ça prend du temps. Les résultats sportifs sont très importants, mais ce ne sont pas les seuls éléments. Il faut définir une vision, un objectif général. Et il faut lui donner les moyens de ses ambitions, ça passe aussi par ce qu’on a fait ici (il montre le Campus). Il faut dessiner une organisation, corriger les erreurs. Et il faut que l’ambition se maintienne, la ligne générale aussi. À mon arrivée, j’ai dit deux choses: pérennité et formation.

C’est-à-dire?

Je suis venu avec l’idée que le jour où je partirai, le club soit dans une situation où il n’aura pas besoin d’un "guide suprême" pour exister. L’actionnaire a une fonction principale: financer. Mais il faut que ce rôle s’atténue avec le temps. C’est-à-dire que le club survive dans un premier temps, puis vive par lui-même ensuite. Dans les paramètres qui lui permettent de vivre, au-delà de l’économique, il y a l’ultra-compétition. On ne peut plus, comme à l’époque de Mourad, aller chercher les joueurs aux quatre coins du monde. Financièrement, ça ne passe plus, parce que le salary cap est très contraignant, et c’est très bien d’ailleurs! Mais on ne permet pas de gagner un championnat, une coupe d’Europe, qu’avec des joueurs recrutés. Alors il faut les former.

Vous avez 86 ans. Apprend-on toujours des choses à 86 ans?

Je ne porte aucune appréciation sur mes compétences mais je mesure mieux l’environnement qui est spécifique. Oui, à Toulon tout est différent. Il fallait aussi que je m’adapte. J’ai connu trois entraîneurs, en comptant Collazo et Azéma. On fait des erreurs, on apprend, il faut changer. Sur l’approche économique du club, j’ai appris beaucoup. Ce qu’il est possible de faire ou non. Sur le plan sportif, il y a des grosses satisfactions, comme la réussite progressive du "RCT Passion" et les progrès de l’équipe première. Une demi-finale de Top 14, même si on ne la gagne pas, c’est pour moi supérieur à une victoire en Challenge Cup.

Parvenez-vous à apprécier certains moments? A profiter?

(Il rigole) Ce n’est pas que je n’ai pas le temps, c’est que le temps s’impose à vous. Une joie, dans le poste tel que je le ressens, dure très peu. Ça dure une soirée. Le lendemain, on est au téléphone avec le staff, on analyse et on se projette. Parce que c’est le rythme qu’impose le Top 14 combiné avec la coupe d’Europe.

Depuis votre arrivée à la tête du club, le 11 février 2020, vous affirmez vouloir équilibrer les comptes, pour ne pas avoir à combler des trous à chaque fin de saison. Où en êtes-vous?

On n’y est pas. On fait des progrès. Mais les progrès ne sont pas assez rapides à mon goût. L’objectif est d’être à l’équilibre d’ici trois ans. On a donc trois saisons pour s’en rapprocher de façon nette. Sans renoncer à nos ambitions. Revenir à l’équilibre, ce n’est pas compliqué: il faut dépenser moins, ou en tout cas pas plus, et compter les recettes. On a un énorme champ de développement, tout en sachant que dans tout club de rugby, il y a un plafond de verre. Au niveau de la billetterie par exemple, avec un nombre de spectateurs précis, et le prix des places avec lequel je ne veux pas jouer. Donc, ce qui peut progresser, c’est le merchandising.

Que représente-il aujourd’hui?

Il était de 6 millions de recettes par an à l’époque de gloire du RCT en 2014. On est aujourd’hui à 2,5 millions, sachant que, quand je suis arrivé, le club était à 0,9 million. Donc, on fait des progrès. C’est bien mais il faut aller beaucoup plus loin. Il faut faire du merchandising autrement qu’avec des boutiques. Les autres secteurs où on peut progresser, ce sont des secteurs où il y a des limites naturelles. Bon, je parlais des hospitalités: par rapport à la norme du Top 14, il nous manque 10 millions, ce qui correspond aux pertes du club. Ensuite, il y a billetterie, où on sait que la marge est élevée. Ou le merchandising, où on a une marge de 30% seulement. Chaque secteur a sa propre capacité de production. Là où il nous faut bondir littéralement, c’est dans le domaine du sponsoring.

Justement, comment expliquez-vous que Toulon a joué toute la saison sans sponsor maillot (le manque à gagner serait supérieur au million d’euros)?

Et bah voilà! Je me pose la même question. Quand un sponsor maillot vous quitte, vous vous retrouvez comme un con si vous ne l’avez pas anticipé.

Toulon en aura un la saison prochaine?

On y travaille. J’espère bien. Il faut changer de méthode.

Var-Matin

Var-Matin

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