Gerlinger, le visage de l'après-Textor ?

Mercredi, Michael Gerlinger faisait partie de la délégation représentant l'Olympique Lyonnais aux obsèques de Bernard Lacombe, à Fontaines-sur-Saône. Le directeur du football d'Eagle était accompagné de Matthieu Louis-Jean, le directeur technique du club, et de Jean Sudres, le directeur de l'administration sportive. Comme eux, il s'est gardé de la moindre déclaration au lendemain de la relégation de l'OL en Ligue 2 prononcée par la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG). Après la cérémonie, il s'est éclipsé en rappelant : « Il n'y a rien à dire aujourd'hui, c'est le jour de Bernard, pas celui de l'OL. »

Nommé en mars 2024, l'Allemand est le dernier arrivé du trio précité dans l'organigramme du club, mais c'est lui qui accompagnait John Textor mardi après-midi pour l'audition des comptes au siège de la LFP. Et ce sera très probablement lui, encore, qui se rendra devant la commission d'appel en juillet, sans l'homme d'affaires américain. Le propriétaire de l'OL envisage depuis la nuit de mardi à mercredi de se mettre en retrait. Il a fait le constat de son échec dans son entreprise de normalisation vis-à-vis des instances du football français et, pour représenter au mieux les intérêts de l'OL désormais, il ne voit pas meilleur candidat.

Il y a près de deux mois, le constat des blocages entre le club et les instances l'avait amené à se séparer de son directeur général (Laurent Prud'homme) et de son directeur administratif et financier (Baptiste Viprey). Cette fois, il pense constituer lui-même un obstacle majeur face à des interlocuteurs qui ne lui feraient plus confiance après trop de rendez-vous manqués.

Mardi, après l'audition, Michael Gerlinger avait quitté la Ligue rapidement en compagnie de Jérémy Aoust, le contrôleur de gestion du club, laissant Textor et Harry Moyal, le directeur général adjoint d'Eagle, demander en urgence les documents complémentaires réclamés par la DNCG depuis le hall de l'instance. Comme si, déjà, l'état-major du club avait compris que ce possible recours interne ne devait pas être publiquement associé à l'annonce tonitruante qui allait suivre. Deux jours plus tard, et un peu plus d'un an après son arrivée dans le Rhône, le dirigeant allemand pourrait donc être poussé en première ligne, lui qui a effectué toute sa carrière un pas en retrait.

Mais, à 52 ans, il tient l'occasion de démontrer les qualités pour lesquelles il a justement été recruté : son entregent, sa science des réseaux, son profil compatible avec les instances. Avant d'atterrir à Décines, il avait officié dix-huit ans au Bayern Munich, où il était entré en 2005 après avoir oeuvré comme avocat en collaboration avec le club bavarois. Il avait, par exemple, été le relais privilégié avec Lyon lors du transfert de Corentin Tolisso en Allemagne, en 2017. En tant que directeur juridique puis vice-président des affaires sportives (à partir de 2021), il a été particulièrement impliqué dans la création en 2008 de l'European club association (ECA), le syndicat des grands clubs européens, dont il a été membre du conseil d'administration et vice-président.

« C'est quelqu'un d'une grande humilité »

Parfaitement trilingue (allemand, anglais, français), il avait été courtisé un temps par l'Olympique de Marseille époque Jacques-Henri Eyraud et n'avait pas été loin de succomber à la tentation, lui dont l'épouse est originaire du sud de l'Hexagone : « Après le départ de "Zubi" (Andoni Zubizarreta), en 2020, il avait été le meilleur candidat que j'avais rencontré pour devenir directeur général du football chez nous, explique l'ancien président de l'OM (2016-2021). C'est d'abord une tête très bien faite, avec un très haut niveau de technicité et une grande connaissance de l'écosystème. Quelqu'un d'une grande humilité, que le foot n'a pas rendu fou, et quelqu'un enfin d'extrêmement impliqué au niveau européen, de très apprécié dans les instances, parce qu'il fait partie de ces dirigeants qui travaillent, ce qui n'est pas forcément la norme. »

À l'époque, les négociations n'avaient pas abouti pour des raisons contractuelles. Mais ferait-il un bon président délégué ? « Oui, sans aucun doute, continue Eyraud. Il est encore jeune, il a beaucoup d'énergie et il est tout à fait capable de reprendre en main un club, de le remettre sur le droit chemin, avec de bons partenaires financiers ».

Quand Gerlinger avait démissionné de ses fonctions au Bayern, le 30 septembre, 2023 Karl-Heinz Rummenigge, qui avait lui-même lâché son poste de président deux ans plus tôt, avait salué « sa grande expertise et son réseau exceptionnel dans le monde du football. »

Sa promotion en tant que dirigeant numéro 1 de l'OL ne serait néanmoins pas un habitat naturel pour cet homme discret, qui a toujours préféré mettre en avant le travail de ses équipes et qui se plaît dans sa complémentarité actuelle avec Louis-Jean et Sudres. Mais l'idée a fait son chemin, et elle sera soumise au préalable aux actionnaires d'Eagle et notamment Michele Kang, ce qui ne devrait pas poser d'obstacle majeur. Cela éteindrait de fait l'hypothèse d'un retour en grâce de Laurent Prud'homme, l'ancien directeur général, écarté en avril.