Municipales à Paris : Emmanuel Grégoire désigné candidat du Parti socialiste par les militants, un affront pour Anne Hidalgo
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Dans la tête d’Emmanuel Grégoire, les choses sont claires depuis longtemps. En 2026, il sera le candidat des socialistes pour les municipales à Paris. L’ancien proche de Jean-Marc Ayrault s’y prépare depuis longtemps. En 2020, le quadragénaire avait d’ailleurs de bonnes raisons d’espérer. Tout juste réélue à l’hôtel de ville, Anne Hidalgo le conforte comme premier adjoint dans l’optique de le préparer à prendre la relève une fois son second mandat terminé. Mais tout ne s’est pas passé comme prévu…
Après plusieurs années de tensions avec Hidalgo, la rupture est consommée. L’adoubement prévu n’est jamais intervenu. Le chemin pour représenter son parti de toujours au scrutin prévu en 2026 a finalement été beaucoup plus long et sinueux. Pour cela, il lui aura fallu convaincre les militants socialistes de la capitale et faire face à l’appareil PS de la capitale.
Car lundi 30 juin, Emmanuel Grégoire s’est imposé dès le premier tour de la primaire organisée par le PS en vue des municipales de 2026. Avec 52,61% des voix, il devance le candidat soutenu par Anne Hidalgo Rémi Féraud (44,33%). Derrière, l’invitée surprise du scrutin Marion Waller ferme la marche avec 3% des votes. Pour la symbolique, l’élu du XIIe arrondissement rêvait d’une victoire au premier tour qui serait donc intervenu le 30 juin, soit un an après sa victoire au premier tour dans la 7e circonscription de Paris aux dernières législatives. «Je remercie les militantes et militants socialistes qui m’ont apporté leur soutien, ainsi que la formidable équipe qui m’a accompagné tout au long de cette campagne, a tweeté Rémi Féraud dans la soirée. Rien n’est plus essentiel que de garder Paris à gauche. Félicitations à Emmanuel Grégoire pour sa désignation.»
Si le socialiste a quitté l’hôtel de ville pour l’Assemblée nationale et a été contraint de se plier à une élection interne, c’est donc à cause de sa brouille avec la maire sortante. Les choses entre les deux ont commencé à se gâter en 2022, au retour de l’édile dans les affaires parisiennes après son échec à la présidentielle (1,75 %, pire score de l’histoire du PS). L’ex-candidate soupçonne la direction de son parti de vouloir la pousser vers la démission pour placer Grégoire avant les municipales. Elle laisse entendre que son bras droit depuis quatre ans ne serait pas si fidèle et loyal que cela… Voyant qu’elle ne l’intronisera jamais, Grégoire prend petit à petit sa liberté et se positionne. En annonçant qu’elle ne se représente pas, Anne Hidalgo soutient finalement Rémi Féraud et fait activement campagne pour lui. «Anne [Hidalgo] a mis toute son autorité pour qu’on ne me soutienne pas. Elle m’a finalement offert une épreuve politique et psychologique dont j’avais besoin. Peu sont allés aussi loin qu’elle face à moi, cela a créé un changement d’image. Avant j’étais uniquement vu comme «l’ancien premier adjoint fidèle et techno». Tout ça m’a donné du caractère», dissertait-il en mai.
Emmanuel Grégoire s’est donc lancé dans l’élection interne contre l’appareil socialiste parisien. La première fédérale Lamia El Aaraje, la quasi-totalité des élus PS de l’exécutif, les maires d’arrondissements de gauche… Tous ont soutenu Rémi Féraud. Au fil de la campagne, le député a toutefois collectionné des soutiens symboliques et importants à commencer par celui de l’ancien maire de Paris de 2001 à 2008 Bertrand Delanoë. Mais aussi d’autres éléphants socialistes comme l’ancien Premier ministre Lionel Jospin, l’ex-président de la région Ile-de-France Jean-Paul Huchon ou encore l’ancien Premier ministre de François Hollande, Jean-Marc Ayrault aux côtés de qui Grégoire a travaillé à Matignon… Anne Hidalgo complétera-t-elle la liste maintenant que son ancien bras droit a gagné la primaire PS ? Rien n’est moins sûr. «Je ne pourrai pas soutenir quelqu’un qui, ces deux dernières années, a passé son temps à me tirer le tapis sous le pied, parce que ça nous fera perdre», a-t-elle affirmé le 13 mars sur Public Sénat. Malgré tout, Emmanuel Grégoire croit que l’édile finira par jeter sa rancœur à la rivière.
Pour convaincre les militants socialistes de le choisir pour porter leurs couleurs dans la capitale, l’ex-premier adjoint a fait valoir son expérience à l’hôtel de ville. Lui qui réfléchit depuis longtemps à sa candidature a aussi concocté un livret programmatique d’une centaine de pages. Sa première mesure s’il est élu maire en mars 2026 ? La mise en place d’un plan pour loger les sans-abri «pour pallier les manquements de l’Etat». Le député entend également créer «un bail solidaire intergénérationnel» pour «encourager la cohabitation entre les jeunes, en priorité les étudiants de passage à Paris, et les personnes âgées, dont certains disposent de chambres disponibles suite au départ des enfants du domicile familial».
Mais s’il veut mettre son programme en œuvre, Emmanuel Grégoire va devoir l’emporter, notamment face à Rachida Dati qui semble faire office, aujourd’hui, de favorite. Dans les premiers sondages réalisés sur le scrutin, la ministre de la Justice devance nettement la concurrence dans tous les scénarios de premier tour. Les enquêtes – qui ne tiennent pas compte cependant de la spécificité du mode de scrutin parisien qui reste, pour l’instant, fait de votes par arrondissements – révèlent toutefois que la gauche peut sauver une capitale conquise en 2001 si elle s’allie au second tour. L’objectif de Grégoire – comme du communiste Ian Brossat et de l’écologiste David Belliard – est de parvenir à une union dès le premier tour (sans La France insoumise) pour ne pas se faire peur. Ce qui est loin d’être fait.
Libération