Documentaire « Every note you play » au cinéma | L'improvisation rencontre la routine
Sans musique, la vie serait une erreur. » C'est ce que disait Friedrich Nietzsche, qui était non seulement philosophe, mais aussi, fait remarquable, compositeur. On fait toujours de la musique d'abord pour soi, puis pour les autres – c'est le point de départ de l'engagement du festival de la petite ville de Monheim am Rhein. Ici, la musique commence par l'écoute de son propre rythme, du tempo de sa propre vie. Et ce faisant, les limites sont constamment franchies, lorsque des éléments qui semblaient initialement s'exclure se combinent de manière inhabituelle, créant un son qui leur est propre.
Bien sûr, il s'agit toujours, au fond, d'une expérimentation. La musique de l'existence ne peut être consommée ou vendue comme un produit : elle s'inscrit dans un processus où la connaissance de soi et la connaissance du monde sont liées. C'est le point de départ de la Triennale de Monheim, qui se tient pour la deuxième fois cet été. Pour la première fois, 16 musiciens expérimentaux du monde entier ont été invités à bord d'un bateau sur les rives de la rivière Monheim. L'idée était de réunir ici quelque chose : l'avant-garde et la société urbaine. À une époque où l'éducation musicale à l'école est considérée comme superflue, cette initiative semble remarquable, remontant au maire de Monheim, Daniel Zimmermann.
Le réalisateur Mika Kaurismäki a été sollicité pour réaliser un film sur la Triennale de Monheim, un film qui capturerait l'esprit de ce petit festival. Mika Kaurismäki est le frère d'Aki Kaurismäki, l'un des réalisateurs les plus novateurs au monde. En 1989, Kaurismäki a réalisé « Leningrad Cowboys go America », un road movie sur un groupe de rock fictif sibérien qui, confronté à un échec persistant dans son propre pays, décide de s'installer aux États-Unis et finit par atterrir au Mexique, où il connaît le succès. Une histoire absurde, racontée avec un drôle de goût, et dont la chute, bien réelle, est que le groupe raté du film est devenu culte. Mika Kaurismäki a également réalisé plusieurs documentaires musicaux remarquables, dont « Moro no Brasil » (2002) et « Mama Africa » (2011) sur la chanteuse sud-africaine Miriam Makeba.
La musique de l’existence ne peut pas être consommée ou vendue comme un produit.
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Engager Mika Kaurismäki pour un documentaire sur la Triennale de Monheim garantit au festival une attention considérable. Le maître-mot est l'improvisation. Folk, jazz, mais aussi des éléments électroniques et de la musique de chambre moderne se combinent pour créer une expérience sonore inédite. Car la musique est avant tout un son, tout simplement : un bruit auquel nous réagissons. Ce sera le point de départ de trois journées expérimentales au cours desquelles la communauté relativement restreinte de musiciens expérimentaux, composée par exemple d'étudiants du lycée de Monheim, montera sur scène pour inventer ensemble de nouvelles musiques. L'Allemand Heiner Goebbels sera présent, connu pour sa pratique révolutionnaire du théâtre musical. Et Shahzad Ismaily, de New York, parlera de « l'esprit musical » qui donne un sens à la vie.
Bien sûr, un festival comme celui de Monheim s'oppose à la tendance dominante à la commercialisation, avec des espaces toujours plus vastes conçus pour répondre aux attentes auto-générées de célébrités toujours plus nombreuses sur scène et dans le public. Un événement doit grandir, sinon ce n'est pas un événement ! Mais Monheim vise autre chose : rester ouvert aux découvertes, même les plus modestes. Les attentes sont déjouées ; personne ne sait au départ quel sera le résultat final. C'est un concept bien plus intéressant, mais moins accrocheur et qui exige la volonté du public de s'engager dans de nouvelles expériences sonores. Peut-on montrer le moment où la musique est créée ? Kaurismäki tente le coup, mais ce moment privilégié est plus souvent caché que révélé.
En fin de compte, tout est une question d'énergie créée – ou non – entre la scène et le public. Cela reste une expérience dont l'issue est ouverte. Si la musique est un langage universel, elle peut ne pas être comprise à un endroit précis et à un moment précis. Cette expérience fait partie intégrante d'un festival comme celui-ci. Reiner Michalke, directeur artistique de la Triennale de Monheim, recherche un lien entre art et politique, et il le trouve ici, à Monheim, de manière idéale. Son credo : « Dans une petite ville, il est plus facile d'accroître la concentration. » Mais combien de temps Monheim pourra-t-elle se permettre un festival aussi exclusif ?
« Every Note You Play » de Mika Kaurismäki ne s'attarde pas sur des informations contextuelles de ce genre ou d'autres. Il se concentre sur des musiciens individuels, les présentant l'un après l'autre dans leur singularité. Mais s'adressera-t-il à un large public ? Non, plutôt à un public restreint, déjà sensibilisé au sujet. On ne peut s'empêcher de penser qu'il s'agit d'un film promotionnel solide, mais pas particulièrement inspiré, pour le Festival de Monheim.
« Every Note You Play » : Allemagne 2024. Réalisé et écrit par Mika Kaurismäki. 82 min. Actuellement au cinéma.
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